Thesaurus : 03. Conseil d'Etat

Publications : Doctrine

 Référence complète : Roda, J.-Ch, Vers un droit de la concurrence des plateformes , in L'émergence d'un droit des plateformes, Dalloz, coll. « Thèmes et commentaires », 2021, pp.77-90.

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► Lire la présentation générale de l'ouvrage dans lequel s'insère cet article. 

Publications : Doctrine

 Référence complète : Houtcieff, D., Les plateformes au défi des plateformes, in L'émergence d'un droit des plateformes, Dalloz, coll. « Thèmes et commentaires », 2021, pp.51-64.

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► Lire la présentation générale de l'ouvrage dans lequel s'insère cet article. 

Publications : Doctrine

 Référence complète : Amrani-Mekki, S., Les plateformes de résolution en ligne des différends, in L'émergence d'un droit des plateformes, Dalloz, coll. « Thèmes et commentaires », 2021, pp.189-203.

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► Lire la présentation générale de l'ouvrage dans lequel s'insère cet article. 

Jan. 17, 2024

Thesaurus : Doctrine

 Référence complète : U. Goldberg, "Collecte et traitement des informations dans les enquêtes internes à l'ère numérique : processus et enjeux", in M.-A. Frison-Roche et M. Boissavy (dir.), Compliance et droits de la défense. Enquête interne – CJIP – CRPCJournal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, coll. "Régulations & Compliance" à paraître.

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📕consulter une présentation générale de l'ouvrage, Compliance et droits de la défense - Enquête interne, CIIP, CRPC, dans lequel cet article est publié

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► Résumé de l'article (fait par le Journal of Regulation & Compliance - JoRC) : L'objet de l'article est de décrire la technologie de l'enquête interne. C'est pourquoi la question des droits de la défense n'y est pas abordée en tant que telle mais plutôt la méthodologie requise par l'objet recherché, le traitement des informations requis pour l'atteindre et les contraintes engendrées par les outils utilisés. Il s'agit en effet d'obtenir une fiabilité et une efficience la plus grande possible dans la collecte des données et le maniement de celles-ci. 

L'auteur expose les méthodes pour obtenir les données. Cela est rendu difficile par la variété des systèmes juridiques simultanément applicables, par les obligations de confidentialité et le caractère personnel de certaines données, ce qui les rend juridiquement inexploitables. Il convient ensuite d'extraire dans la masse des données celles qui seront pertinentes.

La méthodologie utilisée par le professionnel consiste à indiquer clairement au départ le périmètre de la recherche d'informations et les spécificités de l'enquête, cadre à communiquer aux personnes et organisations impliquées. Plus précisément, il faut préciser l'étendue géographique de la recherche, la période couverte, les personnes impliquées dans l'enquête interne, le type de données recherchées, les systèmes informatiques impliqués, le niveau de confidentialité imposé, les procédures internes liées à la conservation des données et à leur accès. Les informations collectées sont soit structurées, soit non structurées, les deux types s'articulant, et la technologie évoluant sans cesse, tandis que les principes de l'enquête doivent demeurer stables.

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🦉Cet article est accessible en texte intégral pour les personnes inscrites aux enseignements de la Professeure Marie-Anne Frison-Roche

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Nov. 17, 2023

Publications

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 Full ReferenceM.-A. Frison-Roche, "The deployment of Regulatory Law through Compliance Law in the European project", in G. Hardy & F. Picod, Compliance Regulation from a European Perspective, Law and European Affairs (L.E.A.), 2023/2, pp. 345-352.

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🚧read the bilingual Working Paper which is the basis of this article, with additional developments, technical references and hyperlinks 

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► English Summary of the article: Compliance Law is neither a method of obeying regulations, nor a simple neutral method of ensuring the effectiveness of norms, nor a means of enforcement displaced from Ex Post to Ex Ante. It is an extension of Regulatory Law and goes beyond it. Like it, it aims to build spaces according to a political project specific to an area, such as Europe. Branch of Law looking to the future as Regulatory Law does, it constructs and maintains, in a systemic way, sustainable, albeit unstable, balances to achieve the ‘Monumental Goals’ in which its normativity resides: security, sustainability, probity, truth, and dignity. By internalising these Monumental Goals in the companies that are in a position to achieve them, the “crucial companies”, Compliance Law preserves the logic of Regulatory Law, offering it a prodigious expansion since it frees it from the condi- tion of a sector and territorial borders, which seemed tautological, by associating private powers and public will, which remains primary. In this way, Compliance can regulate the digital space and climate issue through political choices made by a sovereign Europe.

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Oct. 5, 2023

Thesaurus : Doctrine

 Référence complète : M. Fabre-Magnan, "Les abus de la pornographie. Sanction et prévention par la nullité du contrat", D. 2023, pp.1707-1715

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► Résumé de l'article (fait par l'auteure) : "S'il est difficile, en l'état des moeurs, de prohiber toute forme de pornographie, l'exception artistique ne peut justifier les graves violences, humiliations et abus envers les femmes que donnent à voir la plupart des films contemporains. Le contenu des contrats ayant pour objet de tels actes est, sinon contraire aux bonnes moeurs, au moins illicite. Cette nullité objective est une sanction certes insuffisante mais efficace : elle permet notamment d'éviter d'aller sur le terrain instable du consentement et aussi de rendre nulles et de nul effet toutes les cessions de droit à l'image stipulées, sans empêcher bien sûr le paiement d'une juste rémunération si certaines prestations ont déjà été exécutées.".

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Oct. 1, 2023

Thesaurus : Doctrine

► Référence complète : J.-C. Roda, "Les obligations environnementales et numériques pesant sur les entreprises : quelle gestion des risques concurrentiels ?", Revue Lamy de la concurrence, n°131, 1er octobre 2023, actualité 4501.

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► Résumé de l'article (fait par l'auteur) : "Les entreprises cruciales sont aujourd'hui soumises à des obligations de plus en plus lourdes et qui concernent l'environnement et le numérique. Le franchissement de seuils de « taille » oblige désormais ces acteurs à se plier à la logique de la vigilance et de la compliance. De telles obligations ont un impact concurrentiel, surtout si l'on envisage les choses sous l'angle de la concurrence mondialisée. Comment, dès lors, les entreprises concernées peuvent-elles réagir, pour transformer la contrainte en un nouveau départ ? Celui-ci est-il envisageable ? Faut-il faire acte de résilience ou de résistance ?"

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Sept. 1, 2023

Thesaurus : Doctrine

 Référence complète : J. Groffe-Charrier, "Contrôle de l’âge du public de contenus pornographiques : l’ouverture de la boîte de Pandore ?", Communication-Commerce électronique, n° 9, septembre 2023, pp. 1-4

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 Résumé de l'article (fait par l'auteure) : "La protection des mineurs en ligne se traduit notamment, pour le Gouvernement, par la nécessité de contrôler l’âge des utilisateurs de sites proposant des contenus pornographiques, afin d’épargner les plus jeunes. Toutefois, si l’objectif est louable, les solutions envisagées ne sont pas sans risque et mettent en lumière les limites de la règle légale.".

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July 8, 2023

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 Référence complète : M.-A. Frison-Roche, "Présent et avenir des "causes systémiques" : cas des sites pornos (jugement 7 juillet 2023)", Newsletter MAFR Law, Compliance, Regulation, 8 juillet 2023.

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🧱Consécration de la notion proposée de "cause systémique" dans les contentieux de Droit de la compliance : jugement du Tribunal judiciaire de Paris du 7 juillet 2023, "Youporn" (Arcom c/ Orange et autres)

Ce jugement remet de l'ordre et sursoit à statuer pour permettre au Conseil d'État de statuer sur ce qui est la même question impliquant le système numérique, les obligations des plateformes, la technologie. L'office du juge est en pleine transformation lorsque la Compliance est impliquée et que les systèmes eux-mêmes sont en jeu. 

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July 2, 2023

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► Référence complète : M.-A. Frison-Roche, "Interrégulation : rapport du "pôle commun" entre l'AMF et l'ACPR, reflet d'un phénomène général à tous les secteurs et toutes les autorités", Newsletter MAFR Law, Compliance, Regulation, 28 juin 2023.

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🔴Interrégulation, voie d'ajustement de la Régulation à un monde changé 

L'interrégulation, articulée au Droit souple, est la voie qui permet de conserver la spécificité du Droit de la Régulation, aujourd'hui prolongée par le Droit de la Compliance, tout en répondant à un monde dont le numérique efface les frontières en y imposant pourtant une conception souveraine des politiques : exemple du Rapport annuel publié par le "pôle commun" publié par l'Autorité des marchés financiers (AMF) et l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) en juin 2023. 

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Updated: June 16, 2023 (Initial publication: Nov. 24, 2022)

Conferences

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► Référence complète : Frison-Roche, M.A., Les programmes de compliance, in Université de Lille, Les risques concurrentiels des entreprises à l’aune de la transition écologique et numérique : regards croisés sur les outils de prévention, Lille, 16 juin 2023. ____

► Présentation générale de la conférence : sss

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► pour aller plus loin ⤵️

March 30, 2023

Thesaurus : Doctrine

► Référence complète : A. Latil, Le droit du numérique. Une approche par les risques, Hors Collection, Dalloz, 2023, 300 p.

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📗lire la 4ième de couverture 

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📗lire la table des matières

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► Résumé de l'ouvrage (fait par l'auteur) : "Le droit du numérique est une matière en pleine construction. Cet ouvrage propose d'éclairer son histoire, ses évolutions et ses nombreuses ramifications. en droit civil, en droit de la consommation et en droit pénal. mais aussi en droit administratif et en matière de libertés fondamentales. Il envisage les activités numériques comme la mise en oeuvre de techniques. au même titre que les techniques industrielles ou scientifiques.

Le droit du numérique est fondé sur une « approche par les risques ». Cette approche est aujourd'hui au centre des politiques publiques européennes et internationales. Elle s'applique au droit des marchés financiers, au droit alimentaire ou encore au droit de la cybersécurité. Ses trois dimensions sont ici explorées : l'approche par les risques est libérale. préventive et résiliente.

Le droit des risques trouve ses racines dans la philosophie et la sociologie des techniques. Il vise la protection de la santé, de la sécurité et des droits fondamentaux en mobilisant des notions complexes. comme la confiance, la neutralité, la souveraineté, l'innovation ou encore la résilience. Le droit des risques reste cependant encore mal connu. Il est pourtant à l'origine de mutations majeures de nos systèmes juridiques.".

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Updated: March 15, 2023 (Initial publication: Sept. 16, 2021)

Thesaurus : Doctrine

 Full Reference: R.-O. Maistre,  "What monumental goals for the Regulator in a rapidly changing audiovisual and digital landscape?", ​in M.-A Frison-Roche (ed.), Compliance Monumental Goals, series "Compliance & Regulation", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) and Bruylant, 2023, p.

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► Article Summary (done by the JoRC editor):  In France, since the law of 1982 which put an end to the State monopoly on the audio-visual area, the landscape has profoundly evolved and diversified. In view of the multitude of players who are now established there, the Conseil supérieur de l'audiovisuel - CSA (French High Audiovisual Council) must ensure the economic balance of the sector and the respect for pluralism, in the interest of all audiences. The growing societal responsibilities of audiovisual media and new digital players have multiplied the "monumental goals" on which the Arcom is watching.

Its competences have gradually been extended to the digital space and the successive laws concerning its missions aim at new objectives, in particular in terms of protection of minors, fight against online hate or against disinformation. The emergence of a new European model of Regulation makes it possible to give substance to these additional goals, the Regulator adopting a systemic perspective and calling on soft law tools to fulfill its new missions.

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📘see the general presentation of the book, Compliance Monumental Goals, in which this article is published

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Updated: Feb. 2, 2023 (Initial publication: June 23, 2021)

Thesaurus : Doctrine

 Full Reference: L.-M. Augagneur, "La juridictionnalisation de la réputation par les plateformes" ("The jurisdictionalisation of reputation by platforms"), in M.-A. Frison-Roche (ed.), La juridictionnalisation de la Compliance, coll. "Régulations & Compliance", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) and Dalloz, 2023, p. 97-113. 

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📕read a general presentation of the book, La juridictionnalisation de la Compliancein which this article is published.

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 Summary of the article (done by the author): The large platforms are in the position of arbiter of the reputation economy (referencing, notoriety) in which they themselves act. Although the stakes are usually low on a unit basis, the jurisdiction of reputation represents significant aggregate stakes. Platforms are thus led to detect and assess reputation manipulations (by users: SEO, fake reviews, fake followers; or by the platforms themselves as highlighted by the Google Shopping decision issued by the European Commission in 2017) that are implemented on a large scale with algorithmic tools.

The identification and treatment of manipulations is itself only possible by means of artificial intelligence tools. Google thus proceeds with an automated downgrading mechanism for sites that do not follow its guidelines, with the possibility of requesting a review through a very summary procedure entirely conducted by an algorithm. Tripadvisor, on the other hand, uses an algorithm to detect false reviews based on "fraud modeling to identify electronic patterns that cannot be detected by the human eye". It only conducts a human investigation in limited cases.

This jurisdictionality of reputation has little in common with that defined by the jurisprudence of the Court of Justice (legal origin, contradictory procedure, independence, application of the Rules of Law). It is characterized, on the one hand, by the absence of transparency of the rules and even of the existence of rules stated in predicative form and applied by deductive reasoning. It is replaced by an inductive probabilistic model by the identification of abnormal behaviors in relation to centroids. This approach of course raises the issue of statistical bias. More fundamentally, it reflects a transition from Rule of Law, not so much to "Code is Law" (Laurence Lessig), but to "Data is Law", that is, to a governance of numbers (rather than "by" numbers). It also comes back to a form of collective jurisdictionality, since the sanction comes from a computational apprehension of the phenomena of the multitude and not from an individual appreciation. Finally, it appears particularly consubstantial with compliance, since it is based on a teleological approach (the search for a finality rather than the application of principles).

On the other hand, this jurisdictionality is characterized by man-machine cooperation, whether in the decision-making process (which poses the problem of automaticity bias) or in the contradictory procedure (which poses, in particular, the problems of discussion with the machine and the explicability of the machine response).

Until now, the supervision of these processes has been based essentially on the mechanisms of transparency, a limited adversarial requirement and the accessibility of appeal channels. The French Law Loi pour une République Numérique ("Law for a Digital Republic"), the European Legislation Platform-to-Business Regulation and the Omnibus Directive, have thus set requirements on the ranking criteria on platforms. The Omnibus Directive also requires that professionals guarantee that reviews come from consumers through reasonable and proportionate measures. As for the European Digital Services Act, it provides for transparency on content moderation rules, procedures and algorithms. But this transparency is often a sham. In the same way and for the moment the requirements of sufficient human intervention and adversarial processes appear very limited in the draft text.

The most efficient forms of this jurisdictionality ultimately emerge from the role played by third parties in a form of participatory dispute resolution. Thus, for example, FakeSpot detects false Tripadvisor reviews, Sistrix establishes a ranking index that helped establish the manipulation of Google's algorithm in the Google Shopping case by detecting artifacts based on algorithm changes. Moreover, the draft Digital Services Act envisages recognizing a specific status for trusted flaggers who identify illegal content on platforms.

This singular jurisdictional configuration (judge and party platform, massive situations, algorithmic systems for handling manipulations) thus leads us to reconsider the grammar of the jurisdictional process and its characteristics. If Law is a language (Alain Sériaux), it offers a new grammatical form that would be that of the middle way (mesotès) described by Benevéniste. Between the active and the passive way, there is a way in which the subject carries out an action in which he includes himself. Now, it is the very nature of this jurisdictionality of compliance to make laws by including oneself in them (nomos tithestai). In this respect, the irruption of artificial intelligence in this jurisdictional treatment undoubtedly bears witness to the renewal of the language of Law.

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Feb. 2, 2023

Publications

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 Full Reference: M.-A. Frison-Roche, "Le jugeant-jugé. Articuler les mots et les choses face à l'éprouvant conflit d'intérêts" ("The Judge-Judged. Articulating words and things in the face of the testing conflict of interest"), in M.-A. Frison-Roche, (ed.), La juridictionnalisation de la Compliance, coll. "Régulations & Compliance", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) and Dalloz, 2023, p. 59-80. 

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📝read the article (in French)

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🚧read the bilingual Working Paper which is the basis of this article, with additional developments, technical references and hyperlinks

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📕read a general presentation of the book, La juridictionnalisation de la Compliancein which this article is published

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 Summary of the article (done by the Journal of Regulation & Compliance): Since the topic of this article is part of a chapter devoted to the Company established as Prosecutor and Judge of itself by Compliance Law, chapter aiming to use the relevant qualifications, it is appropriate therefore to worry about the adjustment of words and things, of the way in which the relationship between ones and the others evolve, and of the more particular question of knowing if this evolution is radical or not when one speaks of "judge ".

because "judging" is a word that the Law has disputed with other disciplines, but that it has appropriated not so much to confer more powers on those who act in its name, for example that who supervise and punish, but on the contrary to impose limits, since to the one who judges it has put the chains of the procedure under foot, thus making bearable for the other the exercise of such a power. Therefore, those who want the power to judge would often want to not have the title, because having de jure the title of judge is being subject to the correlated regime, it is to be submitted to procedural correctness.

It is therefore to better limit that the Law sees who judges, for obliging this so-powerful character to the procedure. But the Law also has the power to appoint a judge and to fix the contours of all the characters in the trial. He usually does it with clarity, distinguishing the ones of the others, not confusing them. This art of distinction has constitutional value. Thus, not only the one who judges must be named "judge" but the procedural apparatus which goes with this character, and which constitutes a way of doing things and fundamental rights, are not "granted" by kindness or in a second step: it is a block. If you didn't want to have to endure procedural rights, you didn't have to want to be a judge. Admittedly, one could conclude that the procedure would therefore have become "substantial"; by this elevation, it is rather a fashion of saying that the procedure would no longer be a "servant": it is a kind of declaration of love for the procedure, as long as one affirms that at the acts of judging , or investigating, or prosecuting, are "naturally" attached the procedural rights for the one who is likely to be the object of these powers.

Compliance Law, in search of allies to achieve the Monumental Goals for the aims of which it was instituted, will require, or even demand, private companies to go and seek themselves, in particular through investigations. internal or active vigilance on others, for finding facts likely to be reproached to them. Compliance Law will also require that they prosecute those who have committed these acts. Compliance La will again demand that they sanction the acts that people have committed in their name.

This is clearly understood from the point of view of Ex Ante efficiency. The confusion of roles is often very efficient since it is synonymous with the accumulation of powers. For example, it is more efficient that the one who pursues is also the one who instructs and judges, since he knows the case so well... Besides, it is more efficient that he also elaborates the rules, so he knows better than anyone the "spirit" of the texts. This was often emphasized in Regulatory Law. When everything is Information and risk management, that would be necessary ... But all this is not obvious.

For two reasons, one external and the other internal.

Externally, the first reason is that it is not appropriate to "name" a judge who is not. This would be too easy, because it would then be enough to designate anyone, or even to do it oneself to appropriate the regime that goes with it, in particular for obtain a so-called legitimate power for obtaining that others obey even though they are not subordinate or from them they transmit information, even though they would be  competitors: it would then be necessary to remember that only the Law is able to appoint judge ; in this new Compliance era, companies would be judges, prosecutors, investigators!  Maybe, if the Law says it, but if it didn't, it would be necessary to come back to this tautology ... But are we in such a radicalism? Moreover, do judges have "the prerogative" of judgment and the Law has not admitted this power for companies to judge for a long time? As soon as the procedure is there in Ex Ante and the control of the judge in Ex Post?

The second reason, internal to the company, situation on which the article focuses, is that the company investigates itself, judges itself, sanctions itself. However, the legal person expressing its will only through its organs, we underline in practice the difficulties for the same human being to formulate grievances, as he/she is the agent of the legal person, addressed to the natural person that he/she himself/herself is. The two interests of the two are not the same, are often opposed; how the secrets of one can be kept with respect to the other, represented by the same individual? ... It is all the mystery, even the artifice of legal personality that appears and we understand better that Compliance Law no longer wants to use this strange classical notion. Because all the rules of procedure cannot mask that to prosecute oneself does not make more sense than to contract with oneself. This conflict of interest is impossible to resolve because naming the same individual X then naming him/her Y, by declaring open the dispute between them does not make sense.

This dualism, which is impossible to admit when it comes to playing these functions with regard to corporate officers, can come back to life by setting up third parties who will carry secrets and oppositions. For example, by the designation of two separate lawyers for the human being agent and the human being representative of the legal person, each lawyer being able to have secrets for each other and to oppose each other. These spaces of reconstitution of the so "natural" oppositions in procedure between the one who judges and the one who is judged can also take the technological form of platforms: where there is no longer anyone, where the process has replaced the procedure, there is no longer any human judgment. We can thus see that the fear of conflicts of interest is so strong that we resign ourselves to saying that only the machine would be "impartial", a derisory conception of impartiality, against which it is advisable to fight.

This then leads to a final question: can the company claim to exercise the jurisdictional power to prosecute and judge and investigate without even claiming to be a prosecutor, an investigating judge, or a court? The company's advantage would be to be able to escape the legal regime that classical Law attaches to its words, mainly the rights of the defense and the rights of action for others, the principle of publicity of justice for everyone, which expresses the link between procedure and democracy. When Facebook said on June 12, 2021 "react" to the decision of May 5, 2021, adopted by what would only be an Oversight Board to decide "as a consequence" of a 2-year suspension of Donald Trump's account, the art of qualifications seem to be used in order to avoid any regime constraint.

But this art of euphemism is very old. Thus, the States, when they wanted to increase repression, presented the transformation of the system as a softening of it through the "decriminalization" of Economic Law, transferred from the criminal courts to the independent administrative agencies. The efficiency was greatly increased, since the guarantees of the Criminal Procedure ceased to apply. But 20 years later, Words found their way back to Things: under Criminal Law, slept the "criminal matter", which requires the same "Impartiality". In 1996, a judge once affirmed it and everything was changed. Let us therefore wait for what the Courts will say, since they are the masters of qualifications, as Article 12 of the French Code of Civil Procedure says, as Motulsky wrote it in 1972. Law has time.

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Nov. 12, 2022

Publications

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► Référence complète : M.-A. Frison-Roche, Automated Compliance, a pertinent tool for Compliance Law, the whole, document de travail, novembre 2022.

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📝Ce document de travail sert de base à une participation à un débat sur "Automated Compliance : "the" solution or "a" solution?, qui déroule dans le Sommet global de Gaia-X  le 17 novembre 2022.  

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Résumé du document de travail : s'appuyant sur la présentation préalablement faite au débat par un membre de la Commission européenne, il s'agit de souligner trois éléments qui montrent que l' Automated Compliance (ou Compliance by design) est à la fois un outil central, mais qu'il n'est un outil du Droit de la Compliance dont il ne saurait remplir par sa seule performance technologique toutes les fonctions dans un Etat de Droit.

En premier lieu, l'Union européenne semble en difficulté lorsqu'elle veut tout à la fois bâtir un système juridique qui lui est propre sur la base de Lois dont chacune est la pièce d'un gigantesque puzzle pour obtenir une industrie pérenne et autonome dans une économie numérique mondiale totalement renouvelée, ce qui fait peser sur les entreprises une charge considérable d'intégration de toutes ces règles du jeu, tout en affirmant qu'il faut alléger la charge que la "réglementation" fait peser sur elles.

En second lieu, la meilleure solution pour résoudre cette ambition contradictoire est effectivement dans la technologique, les algorithmes intégrant directement les réglementations. Mais plus encore, l'ensemble de ces textes reposent sur une autonomie laissée en Ex Ante aux entreprises européennes pour s'organiser entre elles afin de concrétiser les "buts monumentaux" que l'Union européenne a décidé d'atteindre, dont la réalisation d'un cloud souverain est au centre.

Ainsi la distinction et l'articulation d'un "Droit de la Compliance", défini par ces "buts monumentaux", dont lequel l'intelligence artificielle est un outil, le "tout" (Compliance Law) et la "partie" (Automated Compliance) est essentielle.

En troisième lieu, cette distinction et articulation est non seulement bénéfice mais elle est obligatoire. En effet, même si le Droit de la Compliance constitue une branche du Droit, elle fonctionne dans le système juridique générale, qui ne fonctionne que par l'esprit des textes, les outils algorithmiques ne capturant que la lettre de ceux-ci. Ces tribunaux sont et seront au cœur du Droit de la Compliance, le cas Schrems l'a bien montré. C'est pourquoi la Technologie et le Droit doivent travailler ensemble, et davantage à l'avenir, notamment parce qu'un outil pour l'effectivité du Droit ne pourra jamais rendre compte de la vie même du système juridique.

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🔓Lire ci-dessous les développements⤵️

 

Sept. 30, 2022

Thesaurus : Doctrine

 Référence complète : T. Douville et E. Netter, « Présentation critique du Data governance act », RTD com., 2022, p. 561-574.

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► Résumé de l'article

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🦉Cet article est accessible en texte intégral pour les personnes inscrites aux enseignements de la professeure Marie-Anne Frison-Roche

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Aug. 8, 2022

Compliance: at the moment

Référence complète : Frison-Roche, M.-A., "Rendre plus coûteux l'accès au marché de la Haine, Newsletter MAFR Law, Compliance", Regulation, 8 août 2022. 

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L'on dit parfois que le Droit européen lutte contre la désinformation tandis que le Droit américain, par une sorte de passion sans limite pour le principe de la liberté d'expression, ne le ferait en rien.

Cela n'est pas exact. Un article paru dans le New York Times du 4 août 2022, Jurors award $45.2 million in punitive damages after lawyer for Sandy Hook parents asks them to "stop Alex Jones.", vient rappeler l'efficacité de l'action en diffamation dans la lutte contre la désinformation (I). Cela montre le souci commun aux Droits américain et européen : le souci d'arrêter la désinformation (II). Il demeure que les deux voies juridiques de lutte contre la désinformation, souci commun, reflètent deux cultures juridiques différentes, le Droit américain continuant de le faire Ex Post et par le calcul économique, le Droit européen le faisant Ex-Ante et par le Droit de la Compliance (III).

 

I. L'EFFICACITÉ DES ACTIONS EN DIFFAMATION POUR LUTTER CONTRE LA DÉSINFORMATION

Cet article, qui vient à la suite d'une série d'autres, le journal suivant depuis longtemps le cas, illustre à travers ce cas le maniement de l'action en diffamation pour sanctionner efficacement l'usage de la désinformation.

Il relate que dans la tuerie en 2012 d'une école d'enfants et d'enseignants, dans 20 enfants sont morts, un conspirationniste, Alex Jones, a par la suite utilisé son système média notamment numérique, dont la maison-mère a pour nom Free Speech et la filiale de diffusion Infowars, pour affirmer que cet évènement était un complot du gouvernement fédéral pour lutter contre le droit constitutionnel de chacun de porter des armes et aboutir à la prohibition par l'adoption d'une loi de celui-ci. Ce complot aurait donc eu pour but de confisquer les armes des Américains, complot dont les parents des enfants décédées auraient été complices.

Les parents de 10 enfants décédés ont agi en diffamation contre Alex Jones.

Les procès ont eu lieu en deux temps, le premier pour engager la responsabilité du défendeur, le second pour calculer le montant des dommages et intérêts.

L'année dernière, la responsabilité du défendeur a été établie à la fois par une juridiction du Texas et une juridiction du Connecticut.

Tandis que le défendeur a déclaré faire appel de son engagement de responsabilité, le verdict concernant le montant des dommages et intérêts a été rendu par le jury de la Cour du Texas.

Le jury a lui-même procédé en deux temps.

Concernant la somme à attribuer aux parents pour compenser la perte de l'enfant : les intérêts compensatoire (compensative damages). Ceux-ci se sont montés à 4 millions, pour compenser leur malheur

Puis le jury a évalué les dommages et intérêts punitifs (punitive damages). Ceux-ci se sont montés à 45,2 millions. Cela se justifie à la fois pour punir le défendeur mais aussi, et surtout, pour le dissuader de continuer, à pratiquer une sorte d'industrie de la désinformation, le verdict s'adressant non seulement à lui mais encore à tous ceux qui pratiquent la même activité commerciale. Ce que l'on pourrait appeler l'activité économique de la Haine.

Cela montre à quel point, alors qu'on affirme si souvent l'inverse, les Droits américain et européen, ont ce fond commun : le souci de lutter contre la désinformation.

 

II. CE QUI EST COMMUN AU DROIT EUROPÉEN ET AMÉRICAIN : LE SOUCI DE LUTTE CONTRE LA DÉSINFORMATION

Les juristes américains rappellent pourtant que l'action en diffamation est depuis longtemps maniée par les juridictions américaines pour que la liberté d'expression ne laisse pas sans défendre contre la désinformation, tout système juridique produisant toujours ce que l'on pourrait appeler ses anticorps, l'action en diffamation étant maniée à la fois pour protéger les victimes mais aussi le système, notamment le système démocratique.

Or, les dommages et intérêts "punitifs" sont 10 fois plus importants que les dommages et intérêts visant à réparer le dommage. Cela s'explique par le calcul économique auquel le jury a procédé, l'analyse économique du Droit étant sans doute plus familière aux Etats-Unis, y compris dans les jurys, qu'en Europe, pour servir ce souci commun de lutte contre la désinformation (A). Les juridictions utilisent alors le Droit de la responsabilité pour infléchir le futur, comme le fait le Droit européen (B).

A. LE CALCUL ECONOMIQUE

En effet, l'article souligne : "The jury announced both awards after several dramatic days in court that included testimony that Mr. Jones and Free Speech Systems, the parent company of his misinformation-peddling media outlet, Infowars, were worth between $135 million and $270 million.".

L'idée est de rendre à l'avenir cette activité médiatique que l'on ne peut éradiquer dans son principe, puisqu'ancrée dans le principe de la liberté d'expression, comme le rappelle la dénomination sociale de la structure faîtière du groupe, ne soit plus rentable, ni même cessible, faute d'acheteur, le revenu de l'activité étant environ d'une cinquantaine de millions par an.

En effet, deux autres procès en évaluation de dommages et intérêts attendent. Si les jurys attribuent une même somme, le coût d'accès au marché de la Haine sera alors suffisamment élevé, notamment si l'on inclut le coût des procès eux-mêmes, le défendeur se plaignant expressément des millions que lui coûtent ces trois procès qu'il estime injustement menés contre lui.

Pour fermer le marché de la Haine, il convient de démonétiser celle-ci, les punitive damages pouvant être utilisés pour ceux-ci. C'est en ces termes que cela a été demandé par l'avocat de la famille de l'enfant de 6 ans tuée, dans ces termes rappelés par l'article : "“Stop the monetization of misinformation and lies. Please.”.".

Le plaisir de haïr et les croyances (ici le complotisme) ne sont effectivement pas le seul moteur de la désinformation, il y a aussi l'appât du gain : accroître le coût d'accès au marché de la haine par une bonne application de l'Economie du Droit, est une solution, dont ici application est faite, le calcul étant alors fait non pour le passé mais pour le futur.

Dès lors, cet entrepreneur pourrait arrêter son business de la haine non par éthique ou amour de la vérité ou disparition de plaisir de haïr mais par rationalité économique, puisque la Haine va cesser de lui rapporter de l'argent.

🔴 Sur l'analyse économique de la Compliance, v. Bruno Deffains et Laurent Benzoni, 📝 Approche économique des outils de la Compliance: finalité, effectivité et mesure de la Compliance subie et choisiein M.-A Frison-Roche (dir.), 📕Les outils de la Compliance, coll. Régulations & Compliance", 2021.

🔴 Sur l'analyse de la nature de la Haine, v. M.-A Frison-Roche, 📧Quand on s'intéresse à la Compliance, lire "La Haine" de Günther AndersNewsletter MAFR Law, Compliance, Regulation1ier août 2022.

 

B. LE MANIEMENT DE LA RESPONSABILITÉ DANS UNE PERSPECTIVE EX-ANTE

Les juges utilisent ainsi la branche du Droit la plus ancienne dans la Common Law (Tort Law) pour se saisir de l'essentiel : l'avenir. Car rien ne peut compenser la mort d'un enfant et c'est sans doute par altruisme que ces parents agissent en justice pour tenter d'obtenir que cette personne à la tête d'un business de la désinformation cesse de nuire.

Ce faisant, ce qui est assez familier à l'Analyse Economique du Droit, dans laquelle le traitement des décisions comme des informations pour calculer les comportements à adopter et les anticipations sont des éléments centraux, les agents étant présumés rationnels, les dommages et intérêts sont utilisés pour obtenir le comportement souhaité : ici l'arrêt.

Le Droit européen est en train de faire bouger un Droit de la responsabilité qui, sans atteindre l'ampleur qu'il a dans le système de Common Law et notamment parce que les dommages et intérêts punitifs continuent de n'être pas admis, s'oriente vers l'avenir, afin d'obtenir des entreprises qu'elles cessent d'avoir des comportements dommageables et/ou qu'elles adoptent les comportements souhaitables.

C'est notamment le cas pour répondre au souci climatique ou dans ce qui sera le traitement juridictionnel du devoir légal de vigilance, dans lesquels il ne s'agit pas d'être sévère dans l'appréciation des comportements passés - ce sont des obligations de moyens - mais il s'agit d'obtenir des comportements adéquats pour le futur. En effet, comme pour l'usage des armes et les enfants que l'on ne peut plus que pleurer, il faut prévenir et infléchir le futur et non pas - ou pas principalement - sanctionner le passé.

🔴 Sur ce mouvement, v. 𝒎𝒂𝒇𝒓, 📝 𝑳𝒂 𝒓𝒆𝒔𝒑𝒐𝒏𝒔𝒂𝒃𝒊𝒍𝒊𝒕é 𝑬𝒙 𝑨𝒏𝒕𝒆, 𝒑𝒊𝒍𝒊𝒆𝒓 𝒅𝒖 𝑫𝒓𝒐𝒊𝒕 𝒅𝒆 𝒍𝒂 𝑪𝒐𝒎𝒑𝒍𝒊𝒂𝒏𝒄𝒆, 2022.

Si ce fond est commun, à savoir le souci commun de lutter contre la désinformation, où l'Europe est davantage en avant, et l'usage du Droit de la responsabilité en le tournant vers l'avenir, où les Etats-Unis sont davantage en avant, les cultures demeurent tout de même différentes.

 

III. LES MODALITÉS DIFFÉRENTES ENTRE L'EUROPE ET LES ÉTATS-UNIS : EX ANTE NON-JURIDITIONNEL VERSUS EX-POST JURIDICTIONNEL

Pour exprimer son souci de lutter contre la désinformation, l'Europe va continuer de privilégier sa culture de la Régulation en Ex Ante (A), tandis que les Etats-Unis continuent sans doute à compter sur la puissance judiciaire (B).

A. LA CULTURE EX-ANTE EUROPÉENNE, À TRAVERS LE DROIT DE LA COMPLIANCE

Ainsi, le Digital Services Act va obliger les entreprises qui offrent des espaces d'information dans le numérique à mettre en place des systèmes de détection et de prévention de la désinformation.

En cela, généralisant et unifiant les systèmes nationaux, les entreprises numériques vont être contraintes en Ex-Ante de lutter activement contre la désinformation, même s'il n'y a pas fusion entre l'entreprise qui tient l'espace de communication et l'auteur du contenu. L'entreprise est ainsi de force associée dès le départ et en continu à la concrétisation du but politique et économique de préservation de la vérité, "But Monumental", que vise la lutte contre la désinformation.

Même si cette obligation de Compliance est une obligation de moyens, l'opérateur est ainsi soumis à la supervision des Autorités publiques, en France l'Arcom. Le Droit de la Compliance prolonge ainsi le Droit de la Régulation dans ce nouvel espace.

🔴 Sur le mouvement d'ensemble, v. Roch-Olivier Maistre, 📝 Quels buts monumentaux pour le Régulateur dans un paysage audiovisuel et numérique en pleine mutation ?,  in M.-A Frison-Roche (dir.), 📕Les buts monumentaux de la Compliance, coll. Régulations & Compliance", 2022.

 

B. LA CULTURE EX-POST AMERICAINE, À TRAVERS LA CONFIANCE D'UN JUGE ACTIF, EXPERT ET DILIGENT

La culture américaine donnant plus de place à la liberté, l'initiative et comptant sur le calcul des individus rationnels, donne plus de place aux juridictions, lesquelles ont un pouvoir considérable, via la procédure, notamment par l'admission des class actions, et via les punitive damages, l'association des deux accroissant le pouvoir juridictionnel.

Le juge américain n'est pas beaucoup plus rapide que le juge européen, ce qui pour une action sur l'avenir peut poser difficulté. L'événement tragique a eu lieu en 2012 et, tandis que les procès évoluaient, le défendeur a mis son groupe sous la protection du Droit américain des faillites (chapter 11).

L'on peut en outre penser que la voie européenne de l'Ex-Ante est plus appropriée, puisque l'Ex-Ante vise à ce que les choses n'arrivent pas, tandis que l'Ex-Post a une ambition moindre, celle de compenser les dommages déjà arrivés : la mort des personnes, la chute de la Démocratie, dont la "compensation" est assez difficile et pour laquelle la restauration est peu concevable.

Mais sans doute est-ce une réflexion européenne que de penser ainsi, puisque la liberté y trouve moins son compte.

Il est vrai que le mouvement de "Juridictionnalisation du Droit de la Compliance" ne fait que commencer en Europe, ce qui doit plus rendre d'autant plus attentifs aux jurisprudences efficaces Outre-Atlantique.

🔴 Sur le mouvement d'ensemble de la Juridictionnalisation, v. M.-A. Frison-Roche (dir.), 📕La Juridictionnalisation de la Compliance, coll. Régulations & Compliance", à paraître.

 

 

Aug. 1, 2022

Compliance: at the moment

► Référence complète : Frison-Roche, M.-A., Quand on s'intéresse à la Compliance, lire "La Haine"​ de Günther Anders, 1ier août 2022.

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► Introduction de l'article : Philosophe allemand, Günter Anders connut la Seconde Guerre mondiale, dût quitter l'Allemagne et vécut dans plusieurs pays. C'est avant tout un philosophe moral, habité par le pessimisme et l'idée que le nazisme n'était qu'une répétition générale, plutôt artisanale, de ce que nous attend : L'obsolescence de l'homme, son livre-maître qui en 1956 décrit le système économique comme ce qui broie les êtres humains en les réduisant à n'être plus que des êtres qui entretiennent des machines qui produisent des produits inutiles qu'ils consomment, les humains n'étant eux-mêmes que des machines désirantes.

En 1985 dans un volume paru en langue allemande et composé d'articles tous consacrés au thème de La haine, il donna comme contribution les éléments de travail de ce qu'il avait conçu comme dernière partie de son oeuvre démontrant l'appareillage obtenant "l'obsolescence de l'homme", dernier livre qu'il ne publia jamais.

Extrait de ce volume, ces documents de travail furent traduits en français et présentés par Philippe Ivernel : le titre en est La Haine.

I. LA FABRIQUE DE LA "HAINE COMME PRODUIT DE CONSOMMATION" POUR ENGENDRER DES COMBATS, PRODUCTEURS A LEUR TOUR DE HAINE : L'ARTICULATION DES DEUX HAINES

Anders est un penseur de la technique, de la technologie (comme l'est Jacques Ellul), expliquant qu'elle n'appartiendra plus à une élite mais au contraire à chacun dans notre vie quotidienne, se mettant ainsi au centre de tout, remplaçant notamment la politique, les êtres humains mécanisés devenant la matière première des machines.

Le titre original, La Haine à l'état d'antiquité désigne le fait que la société de consommation réduisant l'être humain à son aptitude à entretenir des machines et à se comporter lui-même comme une machine consommant les produits fabriqués par des machines, l'être humain ayant pour seul fonction de désirer consommer ce que produisent les machines, et désirant donc finalement rien d'autres qu'entretenir et développer les machines qui l'engloutissent sous tous ces biens, n'a plus de pensée que pour ce monde entièrement voué aux machines.

L'Amour et la Haine sont ainsi reléguées "à l'état d'antiquité" car pour trouver sa place dans ce système de désirs qui convergent vers les machines, il n'est besoin ni d'Amour ni de Haine. Il expose que cela se passe dans deux temps. Dans un premier temps, la Haine est fabriquée pour amener les humains à se battre contre des ennemis qu'ils ne connaissent même pas ; dans un second temps, ils sont suffisamment mécanisés pour attaquer sans que l'énergie de la Haine soit même nécessaire.

Le premier fragment de ses documents de travail expose la façon dont les êtres humains "aiment la Haine" car cela donne à chacun le sentiment d'exister : la Haine. "Je hais, donc je suis. Ou plus précisément : Donc je suis quelqu'un" (p.33).

Il reprend cette idée dans le deuxième fragment dont le titre est (en français dans l'édition allemande) : L'appétit vient en mangeant. Il expose que la Haine n'est pas au départ contre une personne particulière et pousse à l'attaquer. La Haine est à l'état pur, mais c'est plutôt l'atmosphère de haine et "l'amour de la haine". Il suffit de la cultiver et la tourner ensuite à volonté contre un tel ou un tel.

Il évoque ainsi une sorte d'industrie de la haine, en des termes qu'il met dans la bouche du personnage qui dirige la cité : "Sans doute est-il exact qu'ils combattent "leurs ennemis" parce qu'ils les haïssent. Sauf que cette haine envers "leurs ennemis" n'explose précisément pas en s'allumant d'elle-même-meme, ni parce que les premiers leur auraient fait quoi que ce soit. Mais uniquement par ceci que (et donc parce que) je leur livre la haine à chaque fois exigible. Ils la reçoivent de moi gratuitement à domicile. Exactement comme l'eau, le gaz et la TV. Et cette haine qui leur est acheminée, ils la consomment alors, et dans tout à fait dans mon sens à moi : car ils s'engagent, en effet, pleins de haine dans la lutte politiquement opportune. Après quoi commence aussi réellement ce dont vous venez de parler : la deuxième phase de la haine. Car à présent ils haïssent réellement du fait qu'ils combattent. La règle de la haine s'énonce comme suite : "Je combats quelqu'un - de ce fait je me mets à le haïr. L'appétit vient en mangeant, la haine vient en luttant". Ils se battent ainsi "avec appétence" et sont persuadés le faire "avec dignité", devant rester dans l'ignorance de l'absence de raison du combat (qui est la pure volonté de celui qui leur a envoyé la Haine).

Günther Anders fait ensuite expliquer par le personnage politique qu'il fait cela par moralité car il ne veut pas que les hommes en tuent d'autres juste par obéissance à ses ordres, ce qu'ils trouveraient immoral. Il leur fabrique alors de la Haine, de la Haine qu'ils aiment, qu'il dirige ensuite sur des groupes de personnes et ainsi dotés de cette première haine, ils attaquent ceux qu'ils haïssent, le combat accroissant par une seconde haine la première, et tout le système fonctionne bien. Il lui fait ainsi conclure : "C'est pourquoi ils ont besoin de haïr. C'est pourquoi je leur accorde de haïr. C'est pourquoi je leur ordonne de haïr.".

Le troisième fragment porte sur la guerre proprement dite. Anders expose que la Haine n'y est aujourd'hui plus requise parce que la technique permet aux soldats de n'être plus en contact avec les personnes qu'ils combattent, ni même d'être confrontés aux cadavres. La fabrique de la Haine serait donc devenue inutile. C'est pour cela aussi qu'elle aurait vocation à être rangée dans les antiquités... Les soldats sont devenus comme des robots.

Le quatrième fragment développe ce point, sur des soldats "aveugles en telos", au point qu'on pourrait davantage les qualifier "d'employés" des armées que de soldats, exécutant leur travail sans savoir sur qui ou quoi ils larguent les bombes, chacun étant désormais comme à l'arrière du front. Anders souligne que dans ce combat sans haine, mené par les ordinateurs, le combat ne prend jamais fin.

 

II. UNE EXTRAORDINAIRE ANTICIPATION DU SYSTEME COMMERCIALE ET POLITIQUE E DE HAINE

 

A. DISTINCTION DES DEUX HAINES ET ROBOTISATION DES ETRES HUMAINS

L'œuvre de Gunther Anders est particulièrement profitable pour comprendre le monde dans lequel nous vivons. Dans cette ébauche d'ouvrage, retenons l'idée d'une double haine : la Haine fabriquée comme un objet et apportée gratuitement à tout le monde car il y a chez chacun un "amour de la haine" qui est en soi, puisqu'en haïssant, on se sent exister.

La Haine est un objet économique pur, car elle n'a pas d'objet particulier. Elle est fabriquée, cultivée, diffusée, accrue, partagée. Ce n'est que dans un second temps, après avoir ainsi inséré de la Haine pure dans l'esprit des amoureux de la Haine, que l'on peut lui affecter un objet, une personne ou un groupe de personnes et qu'un combat contre ceux-ci peut commencer, producteur d'un second type de Haine. Les deux Haines s'accroissent l'une l'autre.

Le premier intérêt de cette conception est d'isoler ce premier temps de la Haine : une Haine à l'état pur, celle qui existe car haïr permet d'exister, indépendamment de l'objet de la haine. Ce n'est pas donc pas l'objet qui fait naître la Haine, mais l'amour de soi qui fait naître la Haine. Dans un second temps, c'est le hasard ou la manipulation d'un tiers (dans l'exemple pris par Anders le dirigeant politique, mais nous connaissons des influenceurs en dehors du cercle politique) qui offre à la Haine son objet. Mais Anders insiste sur le fait que ces objets sont substituables.

Par cette Haine fabriquée, les êtres humains ont donc l'impression d'exister. C'est alors un stade pire et paradoxal qui s'annonce : celui des êtres humains sans haine, parce qu'on leur aura ôté l'objet de Haine, alors même qu'on leur commande (comme à des "employés") de tuer des semblables, en les mettant technologiquement à distance de l'objet à détruire (Anders prend l'exemple du lancer de bombe). Ils deviennent des robots, et la déshumanisation est ainsi achevée.

C'est en cela que les 4 fragments constituent pleinement la dernière partie de l'œuvre centrale qu'est L'obsolescence de l'Homme.

B. LE MONDE NUMERIQUE, LES RÉSEAUX SOCIAUX ET L' "INTELLIGENCE ARTIFICIELLE"

Le travail publié en 1985 correspond à des réflexions élaborées juste après la Seconde Guerre mondiale et puisant dans les leçons de la Première.

Mais si l'on regarde le monde numérique dans lequel nous vivons, il est en premier lieu construit sur des technologies "neutres", une industrie de l'information qui transforme les êtres humains en consommateurs d'information et en source d'information, constituant eux-mêmes une masse de micro-informations.

En deuxième lieu, les plateformes, et plus particulièrement les réseaux sociaux, sont des espaces neutres, les entreprises qui les tiennent ne sont pas des éditeurs, et le produit pur qui y circulent le mieux est de la "Haine pure", qui est ce qui rapporte à ces entreprises le plus de revenus, les différents objets de haines étant interchangeables.

La Haine est devenue un objet qui est délivré à domicile et dont nous sommes abreuvés en permanence, notre "amour de la Haine" étant alimentée en continu, et sans doute accru.

En troisième lieu, les algorithmes sont présentés comme "intelligents", c'est-à-dire dotés d'une capacité non seulement d'apprentissage mais de choix et de discernement. L'intelligence artificielle serait le progrès, c'est-à-dire la disparation de la haine pour exemple pour prononcer les sanctions les plus adéquates. Les chiffres ont donc remplacé les êtres humains, ce qu'Anders visait à travers les "ordinateurs".

 

III. LE PROFIT QUE LE DROIT DE LA COMPLIANCE PEUT FAIRE DE LA PENSÉE DE GUNTHER ANDERS

A. LE DROIT DE LA COMPLIANCE, DROIT AYANT LA PRÉTENTION DE RÉDUIRE LA HAINE DANS L'ESPACE NUMÉRIQUE

Le Droit de la Compliance est une branche du Droit construit sur des prétentions politiques qui visent à concrétiser des "buts monumentaux".

🔴Marie-Anne Frison-Roche, 📝Les Buts Monumentaux, cœur battant du Droit de la Compliance, in Marie-Anne Frison-Roche (dir.), 📕 Les buts monumentaux de la complianceJournal of Regulation & Compliance et Dalloz, coll. 📚Régulations & Compliance, 2022, p.21-44.

La lutte contre la diffusion de ce qu'il est pertinent de désigner comme l'amour naturel de la haine pure, qui se répand d'une façon virale dans l'espace numérique permettant à la haine d'être "portée à domicile" est une des objets majeurs du Droit de la Compliance.

Le Digital Services Act est imprégné de techniques de Compliance pour y parvenir.

Il ne s'agit pas de compter sur la moralité des personnes, puisque le cœur des humains est d'aimer la haine, ni de les remplacer par des machines car le remède est pire que le mal (la déshumanisation) mais sur la performance technique de ceux qui tiennent ce système économique-là : les plateformes elles-mêmes.

🔴M.A. Frison-Roche, 📝Se tenir bien dans l'espace numériquein Mélanges en l'honneur de Michel Vivant, Penser le droit de la pensée, Dalloz et Lexis Nexis, 2020, pp. 155-168.

En combattant le feu par le feu, c'est-à-dire en obligeant ceux qui ont construit les techniques par lesquelles se diffusent la Haine à construire et à utiliser les techniques de contrôle, de détection et de prévention de celle-ci, le Droit de la Compliance, notamment grâce à son effet naturellement extraterritorial, exprime la prétention de ne pas laisser la Haine régner.

En outre, les Autorités publiques non seulement régulent mais encore supervisent les entreprises et leurs technologies, en l'espèce l'Arcom et la CNIL, dont les pouvoirs Ex Ante s'accroissent.

🔴R.-O. Maistre, Quels buts monumentaux pour le Régulateur dans un paysage audiovisuel et numérique en pleine mutation ?in Frison-Roche, M.-A. (dir.), Les buts monumentaux de la Compliance, série "Régulations & Compliance", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, 2022.

B. LA DÉFINITION TÉLÉOLOGIQUE DU DROIT DE LA COMPLIANCE

L'œuvre d'Anders est parcourue par le désespoir moral d'êtres humains "sans telos", c'est-à-dire sans finalités qui leur soit propres. C'est ainsi qu'ils peuvent être saisis aisément par l'amour de la Haine, puisqu'aucun projet propre n'occupe leur temps et leur force.

Il peut en être de même pour la force du Droit.

Si le Droit ne devait être qu'une technique "réglementaire", "neutre", visant à "l'efficacité" des désirs de chacun et des réglementations accumulées, alors le Droit ne ferait qu'ajouter à la déshumanisation décrite par Anders.

Mais le Droit de la Compliance est par nature une branche du Droit téléologique : elle se définit par ses buts. Et ceux-ci sont "monumentaux".

Ces buts monumentaux ponctuels peuvent tous se ramener à ceci : protéger les êtres humains, afin que la description d'Anders ne soit pas exacte en son cœur désespéré.

🔴M.-A. Frison-Roche, 🚧 Fonder la Compliance, 2022

June 21, 2022

Interviews

Référence complète : Frison-Roche, M.-A., L'efficacité de la compliance illustrée par l'affaire Youporn, entretien avec Olivia Dufour, 21 juin 2022.

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💬 Lire l'entretien 

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June 9, 2022

Conferences

► Référence générale : Frison-Roche, M.-A., Droit de la Compliance et Cloud souverain, in Souveraineté numérique : quelles solutions pour quels problèmes ?  Association Master 2 Droit du Commerce Électronique et de l’Économie Numérique (M2 DCEEN), Université Panthéon-Sorbonne (Paris I), 9 juin 2022, 18h-20h.

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Voir le programme

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Cette intervention s'insère dans un débat coordonné par la professeure Judith Rochfeld, auquel participent également Monsieur le Député Philippe Latombe et Céline Heller (société Google).

Pour ma part, interrogée en premier pendant un 1/4 d'heure, il s'agissait en premier lieu, avant de participer à la discussion générale, de répondre aux trois questions suivantes :

  •  Quelles définitions doivent être retenues pour la souveraineté numérique ?
  • Quel est le rapport entre souveraineté numérique et droit de la compliance ?
  • Plus largement, quelle place le Droit doit-il occuper dans la souveraineté numérique selon vous ?
  • En quoi la souveraineté numérique est-elle un but monumental ? 

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March 31, 2022

Publications

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► Full Reference: FM.-A. Frison-Roche, La responsabilité ex ante, pilier du droit de la compliance ("Ex-Ante Responsibility, Compliance Law Pillar"), D.2022, chronique MAFR - Droit de la Compliance, Recueil Dalloz, March 31, 2022.

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► Article English Summary: The Law must help to face the future, which can be totally catastrophic in terms of climate and digital issues. Courts are s best placed for this, without “governing”, only relying on the commitments made by companies, governments, and legislators.  On the ordinary Tort Law, court decisions oblige these different entities to be consistent in the commitments they have made, obliging them to act in the future, formal “compliance” with the regulations cannot be sufficient. This ex-ante responsibility, founding the powers, thus constitutes a pillar of a substantial Compliance Law, showing the part that CSR and the companies with a raison d'être play in it.

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📝 read the article. (written in French)

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📚go to the presentation of the other articles published in this Chronique Droit de la Compliance made in the Recueil Dalloz

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March 10, 2022

Conferences

► Référence complète : Frison-Roche, M.-A., "Secrets professionnels : spirale d'une importance accrue et d'un affaiblissement fulgurant", participation à la Table-Ronde sur le thème du secret professionnel, in Comité de Liaison des Institutions Ordinales (CLIO), Secret professionnel et indépendance : deux leviers, garants de l’efficacité et de la confiance envers les professions réglementées, 10 mars 2022.

Cette Table-Ronde est animé par Fabrice Lundy, journaliste à Radio-Classique ; y participent également Jean-Luc Sauron, Conseiller d'Etat et Jacques Lucas, Président de l'Agence du Numérique en Santé.

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Lire la synthèse écrite du colloque 

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 Revoir la vidéo de la table-ronde

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► Résumé de l'intervention : Le thème du secret professionnel est appréhendé comme illustration du rôle essentiel joué par les Ordres professionnels dans le monde d'aujourd'hui (le colloque traitant dans un second temps de la question de l'Indépendance). 

Avant toute participation active au débat proprement dit, l'intervention a pour utilité de présenter le Secret professionnel en lui-même, puis en quoi le monde actuel apporte des éléments nouveaux au besoin impératifs de celui-ci, dans le même temps qu'il le met particulièrement en difficulté.

 

I. LA PERMANENCE DES SECRETS PROFESSIONNELS

Le Secret professionnel, comme tout secret, porte sur une information. C'est une information qu'une personne a sur elle-même ou sur une autre, et qui potentiellement peut mettre cette personne en danger, ou la fragilise, ou l'expose, la constituant en situation de faiblesse par rapport à autrui : l'information peut concernant son état de santé, sa filiation, un acte dont un autre pourrait se prévaloir pour la punir plus tard.

Cette information, que la personne garde pour elle ou qu'elle partage avec peu de personnes, elle va la confier à un "professionnel". Pas n'importe quel professionnel : un professionnel en qui elle a confiance, non seulement parce qu'elle croît qu'il est techniquement compétent (un avocat qui connait le Droit, un médecin qui connait la Médecine) mais parce qu'elle croit qu'il va lui aussi garder pour lui cette information sur la faiblesse de son client, malgré le profit qu'il pourrait tirer de la communiquer à d'autres (presse, juge, voisin de table dans un diner, etc.). C'est donc la confiance que la personne en situation de faiblesse a dans le titre même de la personne, parce qu'il est "avocat" ou "médecin" ou "infirmier", etc., qu'il donne cette information, car il sait que parce qu'il est médecin (et pas seulement parce qu'il connait la Médecine), qu'il garde ce secret. Ainsi ce n'est pas le diplôme comme signe de compétence mais le titre comme signe d'appartenance à une profession qui garde les secrets qui est considéré : c'est pourquoi la profession va pouvoir valoriser cette garde des secrets au-delà des frontières par des associations (American Bar Association, par exemple), si elle peut crédibiliser cela (Ordre et secret sont intimes).

Le rapport que le professionnel, nouveau titulaire de l'information, a avec celle-ci découle de cela. Le professionnel est le "gardien" de l'information. Il n'en dispose pas : la personne concernée lui a confié non pas tant l'information que "la garde de l'information". Il exerce donc sur ce secret, c'est-à-dire le fait de ne pas révéler à autrui l'information, un pouvoir📎!footnote-2494. C'est pourquoi par exemple tandis que la personne concernée peut donner l'information à autrui, la presse par exemple, le professionnel, auquel elle s'était confiée, ne le peut pas. Dans la perspective du secret professionnel, dans la notion de "pouvoir", c'est la notion de "charge" qu'il faut voir, une "charge au bénéfice d'autrui"📎!footnote-2494

Cette conception juridique est stable depuis que les professions, notamment les professions libérales, existent : ce n'est pas par les compétences techniques, ni même par le lien personnel, que le secret professionnel se noue : c'est par l'appartenance à une profession : c'est donc par l'organisation même de cette profession et la crédibilité de celle-ci, le contrôle à l'entrée de qui y entre et doit en sortir en cas de manquement, l'effectivité, l'efficacité et l'efficience de la discipline. 

Tout cela n'est pas remis en cause. Au contraire, plus l'Etat a des difficultés en raison de la disparition des frontières et plus cette structure devient en pratique pertinente.

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Mais le choc vient d'ailleurs. Il faut du fait que précisément si les secrets que nous avons tous en nous et que nous voulons tous donner à garder n'ont pas changé, en revanche le monde dans lequel nous vivons a changé : ce monde est devenu numérique. 

 

II. LE CHOC DU NUMERIQUE SUR LES SECRETS PROFESSIONNELS ET L'URGENCE DE LES ACCROITRE

Or, par cette transformation totale du monde dans lequel nous vivons les secrets n'existent plus, les secrets professionnels pas moins mais pas plus que les autres.

Il faut mais il suffit qu'une "fuite" apparaisse dans l'espace digital et l'information est disponible à la fois partout et en un instant : la viralité est la loi naturelle de l'espace numérique qui recouvre le monde.

L'on peut s'en réjouir, parce que l'information est un bien commun, que nous sommes dans un marché de l'information, une économie de l'information, une société de l'information, une civilisation de l'information.

Si l'on est plus mesuré, l'on dira que certaines informations doivent être gardées par ceux qu'elles concernent et dans le cercle choisi des personnes qui ont leur confiance : c'est l'invention européenne des "données à caractère personnel", qui recoupent largement les secrets professionnels. 

Pour l'instant, le Droit tâtonne tant la situation est nouvelle ...

Tout d'abord, le Droit est dans une sorte d'adoration de l'information disponible sur tout, partout et pour tous... Il y développe des principes comme le "droit à l'information" (sans contrepartie financière), le "droit d'alerte" (vite confondu avec le droit de divulguer publiquement, qui n'existe pas ab initio n'apparaissant qu'en cas d'échec du mécanisme d'alerte, le "droit à la transparence" (qui méconnait l'idée même de droits de la défense) qui vont aller de plus en plus contre les secrets, même professionnels.  

Ensuite et surtout, la technologie numérique, qui a structuré l'espace numérique fait qu'une information à l'instant où elle est mise dans cet espace est diffusée immédiatement, partout et demeure disponible pour toujours. 

Dès lors, l'on peut toujours continuer à affirmer le principe des secrets professionnels, ceux-ci n'ont plus d'effectivité.

Or, et c'est lors le paradoxe, l'espace numérique non seulement n'a pas diminué la fragilité des personnes, fragilité compensée par la confiance dans la garde des secrets conservés par les professionnels ; au contraire le numérique a accru cette fragilité. 

Les revenge porn ou les meurtres en direct en sont un exemple : la personne est encore plus fragile dans l'espace numérique. Les "discours de haine" sont un enjeu majeur, non seulement pour la personne qui en est la victime mais pour le système lui-même puisque, comme le démontre Thimothy Snyder c'est aujourd'hui le système démocratique qui peut chuter. 

La "désinformation" peut partir d'une violation d'un secret professionnel, car il peut s'agir d'une information exacte exploitée à des fins nocives, constituant alors une infox, le conspirationnisme étant un phénomène lié au numérique.

Que peut faire le Droit ? 

Il peut aller dans deux directions :

Tout d'abord armer davantage les structures classiques : Ordres professionnels, police, Autorités de poursuites et Juridictions. 

Ensuite, internaliser dans les opérateurs numériques cruciaux, notamment les plateformes, le devoir de bloquer en Ex Ante la diffusion des informations qui doivent demeurer secrètes (données à caractère personnel, et secrets) : c'est le "Droit de la Compliance".

L'exercice de ce devoir par les entreprises numériques cruciales est lui-même supervisé par des autorités publiques : en France, la CNIL et l'Arcom. 

De nouveaux textes sont en cours d'adoption pour obliger les entreprises cruciaux de veiller à ce que les secrets ont préservés. C'est l'un des enjeux du Digital Services Act, Réglement de l'Union européenne en cours de discussion. 

L'avenir est certainement dans un rapprochement entre les structures classiques, notamment les ordres et ses Autorités publiques de supervision. 

Le Droit de la Compliance, nouvelle branche du Droit Ex Ante qui concrétise la garde des secrets peut être une solution dans cette situation à la fois très nouvelle et très préoccupante. 

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► aller à la présentation d'une précédente participation au colloque annuel du CLIO : La déontologie professionnelle dans un monde ouvert et concurrentiel 

► voir la publication qui s'en suivit. 

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► pour aller plus loin : 

👩‍🏫Frison-Roche, M.-A., 📝Les droits subjectifs, outils premiers et naturels du Droit de la Compliance, in Frison-Roche, M.-A., 📕Les outils de la Compliance, 2021

👩‍🏫Frison-Roche, M.-A.,💬 "Et si le secret de l'avocat était l'allié de la lutte contre le blanchiment ?", 2020

👩‍🏫Frison-Roche, M.-A., 📕Avocats et Ordres au 21ième siècle2017

👩‍🏫Frison-Roche, M.-A., 📕Secrets professionnels, 1999

👩‍🏫Frison-Roche, M.-A., 📝Déontologie et discipline des professions libérales1998

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1

Frison-Roche, M.-A., Concevoir le pouvoir, 2022. 

2

Frison-Roche, M.-A., Concevoir le pouvoir, 2022. 

March 8, 2022

Public Auditions

Référence complète : M.-A. Frison-Roche, Audition par la Section du Rapport et des Etudes du Conseil d'Etat pour la préparation du Rapport annuel sur Les réseaux sociaux, Conseil d'Etat, 8 mars 2022.

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Résumé de la présentation faite avant la discussion : Pour la partie reproductible de cette audition, consistant dans la présentation qui a pu être faite de la relation entre le Droit de la Compliance et le phénomène des réseaux sociaux, il a été repris l'idée générale d'un impératif de "réguler un espace sans ancrage" et l'apport que représente pour cela le Droit de la Compliance, dès l'instant qu'il n'est pas défini comme le fait de "se conformer" à l'ensemble de la réglementation applicable à l'agent mais comme la charge d'atteindre des "Buts Monumentaux", négatifs ou/et positifs, l'opérateurs ainsi chargé de cette obligation de moyens parce qu'il est en position de le faire, devant avoir la puissance pour y parvenir.

Se dégagent alors des notions nouvelles, comme la "Responsabilité Ex Ante" ou une notion de "Pouvoir" qui est commune aux opérateurs de droit privé et de droit public, leur nationalité venant également en second plan, le Droit de la Compliance étant naturellement a-territorial. 

Cette définition substantielle du Droit de la Compliance qui met en première ligne les opérateurs requiert que ceux-ci soient supervisé (dans un continuum entre Régulation, Supervision, Compliance,) le Droit de la Compliance opérant un continuum du Droit de la Régulation en n'étant plus lié avec l'impératif d'un secteur. Les opérateurs cruciaux numériques sont ainsi "responsabilisés", grâce à une "responsabilité Ex Ante", et s'ils sont supervisés par des Autorités de supervision (dont le modèle historique est le superviseur bancaire, ici l'Arcom), c'est le juge qui a fait naitre cette nouvelle notion de "responsabilité Ex Ante, pilier du Droit de la Compliance, aujourd'hui délivré du territoire dans une jurisprudence à propos du Climat qu'il convient de concevoir plus largement.

Ainsi délivré du secteur et du territoire, le Droit de la Compliance peut affronter le mal des réseaux sociaux que sont la désinformation et l'atteinte des enfants, maux systémiques où peut se perdre la Démocratie, perspective face à laquelle l'Ex Post est inapproprié. 

Le Droit de la Compliance est donc pleinement adéquat. 

Il convient que le Juge continue sa mue en concevant lui-même non pas seulement dans un Ex Post plus rapide, mais dans un office Ex Ante, contrôlant des entreprises qui, elles-mêmes doivent avoir des fonctions des offices de gardiens (ici gardiens des limites concernant les contenus). 

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Voir ⤵️ la structure plus formelle de l'intervention, qui fut ensuite discutée