1 septembre 2022
Base Documentaire : Doctrine
► Référence complète : A.-V. Le Fur, "Intérêt et raison d’être de l’entreprise : quelle articulation avec les buts monumentaux de la compliance ?", in M.-A. Frison-Roche (dir.), Les Buts Monumentaux de la Compliance, coll. "Régulations & Compliance", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, 2022, p. 55-67.
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► Résumé de l'article (fait par l'auteure) : Les sociétés auraient une âme. Le législateur le pense puisque la loi dite Pacte du 22 mai 2019 oblige les dirigeants à agir dans l’intérêt social et permet aux sociétés de se doter d'une raison d'être. Quant au droit de la compliance, il compte sur les entreprises pour sauver le monde de la corruption, de l’esclavage, du terrorisme, du réchauffement climatique…, pour atteindre ainsi des buts monumentaux.
De prime abord, les contours de l’intérêt social et de la raison d’être ne sont guère éloignés des buts monumentaux de la compliance. Guère surprenant, puisque l’objectif qui a présidé à leur introduction dans le Code civil est le même que celui sous-jacent au droit de la compliance : repenser la place de l’entreprise dans la société, en affirmant des valeurs ou des préoccupations de long terme. Voilà donc une raison de faire appel à ces notions du droit des sociétés dans le cadre d’une radioscopie de la notion même de buts monumentaux.
Or, une première approche, comparative, s’avère décevante. Les divergences entre les notions sociétaires et la compliance conduisent à considérer que le droit des sociétés n’a pas vocation à imposer autre chose qu’un ordre public sociétaire. Notions plus philosophiques que juridiques, intérêt social et raison d’être se voient attribuer des fonctions qui limitent leur portée. L’impérativité des règles sociétaires, et c’est une conséquence de ce qui précède, n’est pas comparable avec celle de la compliance : incertaine, elle est également relative lorsque qu’on la compare avec la « violence » des règles de compliance. L’impact des notions d’intérêt social et de raison d’être reste donc principalement interne à la société.
Mais, selon une seconde approche, il n’est pas exclu qu’intérêt social et raison d’être- autorisent une meilleure appréhension de valeurs supérieures et universelles par le droit des sociétés. L’intérêt social peut intégrer les buts monumentaux de la compliance tandis que la raison d’être peut constituer une perspective de réalisation de ces buts.
L’enjeu n’est pas des moindres : lorsque l’intérêt de la société, en tant que personne morale et agent économique autonome, rejoint les buts monumentaux, on démultiplie les moyens d’atteindre ceux-ci en les internalisant dans toutes les sociétés, et pas seulement celles de grande taille. Reste qu’en dépit de toutes les bonnes intentions, une société n'est gouvernable que si la boussole ne devient pas une girouette insaisissable et indécise ; en d’autres termes, si la sécurité juridique est respectée. C’est pourquoi, un ordonnancement juridique des notions en présence s’impose, ce qui conduit in fine à suggérer leur domaine, leur contenu et leur portée.
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1 septembre 2022
Base Documentaire : Doctrine
► Référence complète : C. Peicuti et J. Beyssade, "La féminisation des postes à responsabilité dans les entreprises comme but de la compliance. Exemple du secteur bancaire", in M.-A. Frison-Roche (dir.), Les Buts Monumentaux de la Compliance, coll. "Régulations & Compliance", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, 2022, 109-124.
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► Résumé de l'article (fait par le Journal of Regulation & Compliance) : Si l’on conçoit les techniques de Compliance comme prenant leur sens par leur But, celui-ci étant notamment la protection et la promotion effective des êtres humains, devant se renforcer à l'avenir grâce au Droit Ex Ante de la Compliance, l’exemple de la promotion efficace de l’égalité effective entre les femmes et les hommes dans le secteur bancaire pour exercer des fonctions de responsabilité est probant.
Secteur fortement féminisé, son image demeure pourtant masculine et de fait trop peu de femmes y exercent des fonctions de responsabilité, alors qu'aucun texte ne s'y oppose et que tous les droits ont été attribués pour cela. Pour passer de cette situation à un avenir où l'égalité sera effective, c’est donc en termes de régulation qu’il convient de penser la transformation nécessaire et plus encore de « transition » pour qu'un jour une égalité de fait soit établie et apparaisse à tous naturelle.
La banque doit alors structurellement intégrer ce But, ce qui correspond à la définition de la Compliance. Pour ce faire l’entreprise bancaire s’insère sur le long terme dans une démarche volontaire de Compliance, en s’appuyant notamment sur les ressources humaines et sur les autorités de l’Union bancaire qui, en installant davantage le concept d’économie durable, ont facilité cette action à long terme. Dans cette transition chaque action et résultat doit être pensé par rapport à ce but recherché d'une égalité effective : chaque progrès doit être valorisé non pas tant par rapport au passé mais par rapport au futur. Cette perspective Ex Ante justifie que les techniques auto-contraignantes de Compliance, comme les plans, les engagements, les quotas, les implications des parties prenantes, et les techniques plus souples comme les exemples donnés par les managers, les formations internes et les affirmations communes avec les autorités publiques, soient toutes utilisées par l’entreprise pour atteindre ce But Monumental d’égalité effective entre les êtres humains.
Le secteur bancaire est d’autant plus exemplaire pour cela que les Autorités bancaires elles-mêmes déploient des incitations dans ce sens, la définition du Droit de la Compliance entre alliance entre les Autorités et les Opérateurs correspondant donc à une telle action clairement en cours, structurellement dans le groupe BPCE.
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1 septembre 2022
Publications
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► Référence complète : M.-A. Frison-Roche, "Les Buts Monumentaux, cœur battant du Droit de la Compliance", in M.-A. Frison-Roche (dir.), Les Buts Monumentaux de la Compliance, coll. "Régulations & Compliance", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, 2022, p. 21-44.
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► Résumé de l'article : Le droit de la compliance peut être défini comme l'ensemble des procédés obligeant les entreprises à donner à voir qu'elles respectent l'ensemble des réglementations qui s'appliquent à elles. L'on peut aussi définir cette branche par un cœur normatif : les "buts monumentaux". Ceux-ci permettent de rendre compte du droit positif nouveau, rendu ainsi plus clair, accessible et anticipable. Ils reposent sur un pari, celui du souci de l'autre que les êtres humains peuvent avoir en commun, forme d'universalité.
Par les Buts Monumentaux, apparaît une définition du Droit de la Compliance qui est nouvelle, originale et spécifique. Ce terme nouveau de "Compliance" désigne en effet une ambition nouvelle : que ne se renouvelle pas à l'avenir une catastrophe systémique. Cet But Monumental a été dessiné par l'Histoire, ce qui lui donne une dimension différente aux Etats-Unis et en Europe. Mais le cœur est commun en Occident, car il s'agit toujours de détecter et de prévenir ce qui pourrait produire une catastrophe systémique future, ce qui relève de "buts monumentaux négatifs", voire d'agir pour que l'avenir soit différent positivement ("buts monumentaux positifs"), l'ensemble s'articulant dans la notion de "souci d'autrui", les Buts Monumentaux unifiant ainsi le Droit de la Compliance.
En cela, ils révèlent et renforcent la nature toujours systémique du Droit de la compliance, comme gestion des risques systémiques et prolongement du Droit de la Régulation, en dehors de tout secteur, ce qui rend disponibles des solutions pour les espaces non-sectoriels, notamment l'espace numérique. Parce que vouloir empêcher le futur (faire qu'un mal n'advienne pas ; faire qu'un bien advienne) est par nature politique, le Droit de la Compliance concrétise par nature des ambitions de nature politique, notamment dans ses buts monumentaux positifs, notamment l'égalité effectif entre les êtres humains, y compris les êtres humains géographiquement lointains ou futurs.
Les conséquences pratiques de cette définition du Droit de la Compliance par les Buts Monumentaux sont immenses. A contrario, cela permet d'éviter les excès d'un "droit de la conformité" visant à l'effectivité de toutes les réglementations applicables, perspective très dangereuse. Cela permet de sélectionner les outils efficaces au regard de ces buts, de saisir l'esprit de la matière sans être enfermé dans son flot de lettres. Cela conduit à ne pas dissocier la puissance requise des entreprises et la supervision permanente que les autorités publiques doivent exercer sur celles-ci.
L'on peut donc attendre beaucoup d'une telle définition du Droit de la Compliance par ses Buts Monumentaux. Elle engendre une alliance entre le Politique, légitime à édicter les Buts Monumentaux, et les opérateurs cruciaux, en position de les concrétiser et désignés parce qu'aptes à le faire. Elle permet de dégager des solutions juridiques globales pour de difficultés systémiques globales a priori insurmontables, notamment en matière climatique et pour la protection effective des personnes dans le monde désormais numérique où nous vivons. Elle exprime des valeurs pouvant réunir les êtres humains.
En cela, le Droit de la Compliance construit sur les Buts Monumentaux constitue aussi un pari. Même si l'exigence de "conformité" s'articule avec cette conception d'avance de ce qu'est le Droit de la Compliance, celui-ci repose sur l'aptitude humaine à être libre, alors que la conformité suppose davantage l'aptitude humaine à obéir.
C'est pourquoi le Droit de la Compliance, défini par les Buts Monumentaux, est essentiel pour notre avenir, alors que le droit de la conformité ne l'est pas.
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1 septembre 2022
Base Documentaire : Doctrine
► Référence complète : S. Lochmann, "Les agences de notation ESG et l'effectivité de la compliance face à la compétitivité internationale", in M.-A. Frison-Roche (dir.), Les Buts Monumentaux de la Compliance, coll. "Régulations & Compliance", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, 2022, p. 401-412.
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► Résumé de l'article (fait par le Journal of Regulation & Compliance) : Cet article a pour objet de montrer que les marchés, ceux qui y apportent des financements et ceux qui y puisent ceux-ci ayant besoin d'information sur la dimension environnementale, sociale et de gouvernance des entreprises impliquées, les agences de notations ESG sont des entreprises qui concourent à la performance globale du système et convergent aux buts monumentaux qui animent le Droit de la Compliance.
Dans cette perspective et prenant comme exemple concret Moody's, l'article expose tout d'abord le rôle joué par une agence de notation ESG et sa méthodologie d'évaluation, notamment les critères retenus la façon dont les entreprises informent les marchés et les parties prenantes en la matière, notamment à propos du climat, convergeant en cela avec les Autorités publiques et avec les différents textes internationaux, traités et textes de droit souple qui se succèdent.
Cette convergence entre l'activité des agences de notation ESG et le Droit de la compliance en ce qu'il s'organise normativement autour de Buts Monumentaux est particulièrement marqué dans l'organisation d'une "transition juste", l'activité de l'agence s'insérant dans la construction des textes européens. Il apparaît ainsi que l'écosystème de l'investissement ESG est en pleine évolution, impliquant une pleine collaboration entre tous les participants de l'industrie du financement pour un financement durable et, in fine, la permanence de la démocratie.
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1 septembre 2022
Base Documentaire : Doctrine
► Référence complète : Ch. Huglo, "À quelles conditions le droit climatique pourrait-il constituer un but monumental prioritaire ?", in M.-A. Frison-Roche (dir.), Les Buts Monumentaux de la Compliance, coll. "Régulations & Compliance", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, 2022, p.169-174.
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► Résumé de l'article (fait par le Journal of Regulation & Compliance) : L'auteur considère que le service que la compliance rend à la Société peut effectivement être considéré comme monumental et, confrontant la compliance à la question du climat, estime que le Droit climatique doit devenir non seulement un "But Monumental", mais encore être le premier. Il souligne les obstacles profonds pour poser même cette idée, de deux ordres, le premier étant le fait que le Droit s'est plutôt centré sur les pollutions passées, alors que l'enjeu est aussi la mesure de l'impact futur et la prévention. Le second tient à ce que les multiples textes et engagements n'ont pas de force obligatoire directe. Ce sont donc les tribunaux qui aujourd'hui, en raison de leur indépendance et la place que prend la science dans le débat contradictoire qui se déroule devant eux, la Société civile leur apportant la question du climat à laquelle ils sont de droit obligés de répondre, prennent les décisions à partir desquelles l'on peut penser que la "justice climatique" se constitue.
En cela, le Droit climatique investi par les juridictions rejoint le Droit de la Compliance dans les objectifs poursuivis, en mettant en premier lieu la connaissance, la prévention et l'action pour préserver ce que le climat met aujourd'hui en jeu : la dignité humaine.
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31 août 2022
Responsabilités éditoriales : Direction de la collection "Cours-Série Droit privé", Editions Dalloz (34)
►Référence complète : Piédelièvre, S., Instruments de crédit et de paiement, 12ième éd., Dalloz, Coll. "Cours Dalloz-Série Droit privé", 2022, 453 p.
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►Présentation de l'ouvrage : l'ouvrage expose tout d'abord la théorie des comptes. Puis les instruments de crédit, que sont les effets de commerce et les nouveaux instruments de crédit. Dans la seconde partie de l'ouvrage, les instruments de paiement sont expliqués, à savoir le chèque et les nouveaux moyens de paiement.
Ce manuel permet ainsi de comprendre les instruments juridiques par lesquels les entreprises se procurent du crédit et paient les créances que les tiers ont sur elles : la lettre de change ou le billet à ordre ou le chèque, l'ensemble fonctionnant le plus souvent à travers un compte bancaire.
Dans cette tradition qui demeure ancrée dans le droit civil dont les principes directeurs continuent de régir la matière, la modernité de certains instruments renouvelle celles-ci, comme la cession Dailly ou encore la monnaie électronique qui bouleverse le droit du paiement.
Ce manuel clair et avant tout pédagogique explique cette dialectique du droit classique et de la modernité des techniques.
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📚Consulter l'ensemble de la collection dans laquelle l'ouvrage a été publié.
28 août 2022
Compliance : sur le vif
► Référence complète : Frison-Roche, M.-A., "Dans le Droit de la Régulation, la Concurrence est un principe adjacent, pas premier : exemple des investissements dans le réseau ferroviaire européen", Newsletter MAFR Law, Compliance, Regulation, 28 août 2022.
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Le Droit de la concurrence est tautologique puisqu'il a pour objet la concurrence.
Dans le droit civil de la concurrence, il restaure ou préserve la compétition entre concurrents dans l'état où elle se trouvait (responsabilité) ou se trouve (contrat) ; dans une façon plus ambitieuse et plus politique, le Droit européen des marchés concurrentiels a pour but de construire et de garder les marchés concurrentiels. Le Droit de l'Union étant directement applicable en Droit français, nous vivons sous le ciel de ces deux perspectives.
🔴 M.-A. Frison-Roche et J.-Ch. Roda, Droit de la concurrence, Précis Dalloz, 2022
Son statut en tant que branche du Droit a toujours été l'objet de disputes. Certains pensent que le fonctionnement concurrentiel pur et simple, c'est-à-dire la lutte de tous contre tous pour susciter des demandes qui rencontreront les meilleures offres dans un prix d'équilibre, suffit à produire une société satisfaisante, les défaillances d'une telle "loi" (au sens scientifique du terme) justifiant simplement que, par exception, l'on prenne des dispositions spécifiques et exceptionnelles : cela fait alors du Droit de la concurrence un "ordre concurrentiel" et la discipline-mère de toutes les autres branches du Droit, parce que l'Économie serait elle-même la discipline-mère de toutes les autres disciplines, le Droit n'étant alors que l'expression neutre de l'Economie", science du marché.
Le Droit européen de la concurrence se développe donc à partir de son but : la construction et la garde des marchés concurrentiels. Textes, jugements et raisonnements partent des buts, à partir de raisonnements dits "téléologiques", qui fournirent l'ossature de tout le système, essentiellement conçu par la Commission européenne et validé par la Cour de Justice.
Après des décennies d'adhésion à cette idée, aux conséquences techniques considérables, l'on est en train de mettre en doute ce but même.
Cela ne peut que transformer l'ensemble du Droit européen, la place qu'y occupe le Droit de la concurrence, voire la conception même de ce Droit. Par exemple par rapport au Droit de la Régulation, qui sortirait enfin de son statut toléré d'exception.
L'Europe de la Régulation est effectivement en marche, comme on le voit en matière numérique, mais aussi dans tous les secteurs techniquement régulés. Où se situe alors le Droit de la concurrence ?
🔴E. Claudel (dir.), La concurrence dans tous ses états, 2021
Sans même aller vers l'exemple éclatant des textes adoptés ou en cours d'adoption en matière numérique (Digital Markets Act, Digital Service Act, Data Governance Act, Chip Act), que l'on pourrait encore présenter comme une exception propre au numérique (même si les technologies numériques recouvrent l'ensemble de notre monde), l'évolution concerne l'ensemble des secteurs régulés.
En effet, le Droit de la Régulation a longtemps été présenté soit comme un appareillage que l'on devait mettre en place parce qu'un secteur était techniquement inapte à recevoir le plein bénéfice du mécanisme de la concurrence (théorie des "défaillances de marché"), en présence par exemple de réseaux de transport constitutifs de monopoles économiquement naturels, soit comme la voie par laquelle des secteurs organisés antérieurement sous une forme de monopoles économiquement injustifiés (des monopoles publics) allaient passer, le plus rapidement possible et dans le plus de segments possible, du secteur public monopolistique au principe concurrentiel.
Le Droit de la Régulation était alors défini comme un Droit de nature transitoire permettant de passer d'un état passé essentiellement monopolistique vers un état futur essentiellement concurrentiel. Ce passage ne pouvant se faire en un instant et spontanément, du fait notamment de la résistance des opérateurs publics et des États, des Autorités de Régulations et des règles spécifiques ont été établies pour construire ce passage. Une fois cela fait, ce qui reste de "défaillance de marché" devait d'une façon définitive supervisé par l'Autorité qui pourrait alors demeurer à ce titre dans un secteur gouverné par le principe de concurrence, dans une "régulation symétrique".
L'on crût notamment que le Droit de la Régulation pourrait n'être que "transitoire" dans le secteur des télécommunications et se dissoudre dans le Droit de la concurrence, lequel serait suffisant à régir une activité qui n'avait rien de spécifique, le seul enjeu étant le prix des abonnements. On ne le croit plus. Mais toutes les règles avaient été conçues et appliquées à partir de ce postulat.
De la même façon le principe de concurrence fût appliqué à tous les secteurs régulés, en affirmant qu'il devait être traité comme le principe premier, puisqu'il était l'objectif même des dispositifs de Régulation. Ce fût notamment le cas en matière énergétique. Dire le contraire, notamment pour des raisons de sécurité d'approvisionnement, n'eut pas d'écho, puisque l'objectif exprès de la directive européenne de 1996 était d'ouvrir le secteur à la concurrence en diminuant la domination et la puissance des opérateurs publics nationaux, par exemple EDF. Nous le payons aujourd'hui.
🔴A l'époque pour défendre la Régulation comme principe premier, M.-A. Frison-Roche, La concurrence, objectif adjacent de la régulation de l'énergie, 2014
Mais l'Europe change. Les nouveaux textes en matière ferroviaire le montrent.
En effet, le Droit de la Régulation ferroviaire, comme tous les autres Droits des autres secteurs régulés, avait été conçu comme un appareillage pour conduire ces secteurs naguère gouvernés par des monopoles vers le principe concurrentiel. L'ARAFER, puis l'ART (Autorité de Régulation des Transports) a été chargée d'accompagner l'ouverture à la concurrence du secteur et de rendre effective celle-ci.
Dans le bilan que le Régulateur a fait en juillet 2022 de 6 ans de son action, Six ans de régulation des transports (2016-2022). De l'ARAFER à l'ART, ce principe est rappelé par son président, l'essentiel étant donc le prix payé par le consommateur : "Si elle ne régule pas directement les prix payés par les usagers mais intervient, pour l’essentiel, en amont, l’Autorité de régulation des transports, que j’ai l’honneur de présider depuis 2016, doit bien contribuer, in fine, à assurer à l’usager final les meilleurs tarifs au regard de la qualité fournie.".
Mais si un secteur est régulé, cela peut être non pas parce qu'il est "défaillant" dans son aptitude à produire par ses seules forces le prix adéquat mais parce que le secteur présente un caractère crucial, et certaines entreprises qui y opèrent également.
🔴M. -A. Frison-Roche, Proposition pour une notion : l'opérateur crucial, 2006
L'Europe commence à l'admettre, secteur après secteur. D'abord avec le secteur bancaire, parce qu'il est indissociable de la monnaie. Puis, mais si récemment ..., avec le secteur de l'énergie. Puis, avec les télécommunications, difficilement dissociables du numérique.
Aujourd'hui avec le ferroviaire, non seulement les difficultés du transport du blé montrent que l'indifférence à l'unification des infrastructures pour sillonner l'Europe étant un souci majeur, dont la presse se fait l'écho dans des termes similaires, par exemple BFM ou Le Figaro, mais c'est avant désormais non pas tant une question d'harmonisation des écartements de rails pour assurer l'interopérabilité du transport ferroviaire dont il s'agit mais d'investissements massifs aujourd'hui nécessaire pour dispositif d'un réseau ferroviaire européen.
Or, celui-ci est entravé par le Droit de la concurrence car seuls les Etats peuvent investir dans ce qui relève avant tout d'une perspective du service public. Or, l'Europe n'a pas les moyens financiers de le faire, pas plus que les entreprises en compétition. Seuls les États-membres le peuvent, soit directement soit en aidant leurs entreprises.
Mais la prohibition des aides d'Etat, prohibition qui n'existe pas dans le Droit américain de la concurrence, prohibition qui ne se justifie que par la réduction du Droit de la concurrence au seul commerce et la destruction des barrières nationales, l'interdit.
C'est contre cette prohibition que dans un premier temps à l'occasion des crises, notamment bancaires et financières, la Commission européenne elle-même est intervenue, ce qui a sauvé l'Europe en 2008 en permettant la recapitalisation des banques.
Mais aujourd'hui, c'est en dehors des crises qu'il faut repenser les investissements, notamment dans la perspective du Pacte vert qui est avant tout un texte porte sur l'Industrie et les Investissements, perspectives de Régulation et non de commerce. Ce Green deal impacte particulièrement les transports.
Parce que le Droit de la Régulation a besoin de subventions publiques pour dérouler des programmes Ex Ante, par exemple pour bâtir des structures ferroviaires, c'est en dehors même des crises et sous la forme de Règlement général que la Commission européenne propose de permettre aux Etats de construire une Europe ferroviaire, par un Règlement habilitant la Commission à délivrer des exemptions par catégorie en la matière.
Cette Europe ferroviaire qu'il aurait fallu construire dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, en articulation avec le Traité CECA. Mais il n'est jamais trop tard.
En effet, la Commission européenne a déposé le 6 juillet 2002 une proposition de Règlement pour permettre de tels investissements, éventuellement publics, sans que la prohibition des aides d'Etat n'interfère, la Commission devenant habilitée à délivrer des exemptions pour ce faire. Se référant à sa stratégie pour une croissance durable, la Commission a rappelé que des actions en matière de transport " peuvent soutenir fortement la transition écologique en entraînant d’importantes réductions des émissions de gaz à effet de serre et en améliorant la qualité de l’air, tout en favorisant la croissance de la productivité et en renforçant la résilience des écosystèmes industriels", soulignant " l’importance des investissements dans les transports publics et dans les infrastructures qui favorisent la transition vers une mobilité plus durable et intelligente, notamment dans des réseaux multimodaux européens continus et efficaces ainsi que dans la modernisation des réseaux transeuropéens de transport pour les voyageurs et le fret.".
Sous ce vocabulaire de "réseaux multimodaux européens continus et efficaces", c'est bien le service public que l'on retrouve et ce sont des actes de services publics qui pourront bénéficier des futures exemptions par catégorie délivrées par la Commission, le but étant donc non plus d'offrir le prix le plus adéquat possible mais bien un réseau ferroviaire européen qui permet aux marchandises (par exemple les céréales) et aux personnes de circuler sur le territoire de l'Europe. Rappelant ensuite que cet enjeu est lui-même en connection avec d'autres stratégies majeures de l'Europe, la Commission en conclut : "Ces objectifs ne sauraient être atteints sans des investissements considérables des États membres. ".
Concrètement, les investissements requis sont non seulement "considérables" mais très variés : " L’éventail des investissements que les États membres pourraient envisager pour soutenir des modes de transport à faibles émissions va des investissements dans une flotte nouvelle ou existante aux investissements dans l’infrastructure ferroviaire, les terminaux de transbordement et les ateliers de maintenance, également dans le but de stimuler la demande en faveur d’une flotte à émissions nulles et de solutions numériques permettant l’interopérabilité entre les modes de transport et au sein des secteurs.".
La conclusion de la Commission est donc : "Il convient dès lors de disposer de règles en matière d’aides d’État qui autorisent ces investissements lorsqu’un tel soutien public est nécessaire, tout en préservant et en renforçant la concurrence dans les transports par chemin de fer et par voie navigable et le transport multimodal.".
A partir de là, la Commission estime que l'ensemble des textes préalablement adoptés, notamment les lignes directrices qui expriment l'esprit dans lequel les règles doivent être interprétées à cette nouvelle lumière, mérite d'être repensé et propose l'adoption de cette habilitation lui permettant de délivrer seule des exemptions par catégorie en matière de transport ferroviaire et par voie navigable. En effet, "Selon l’expérience de la Commission, les aides à la coordination des transports sont essentielles au transfert modal et, sous réserve de certaines conditions, ne donne pas lieu à d’importantes distorsions de la concurrence. En outre, une exemption par catégorie des aides à la coordination des transports est largement souhaitée par les États membres. Il y a dès lors lieu de permettre à la Commission de soumettre à une exemption par catégorie les aides octroyées par les États membres en faveur de ces mesures, lorsque certaines conditions sont remplies."
Suit des cas qui seront couvert par le Règlement d'exemption, mais il est rappelé par la Commission à cette occasion que : "En ce qui concerne le transport de fret en particulier, les obligations de service public pourraient constituer un instrument approprié pour promouvoir des services dans les zones et les segments dans lesquels le transport de fret ne se ferait autrement que par la route".
C'est donc bien un Droit global de Régulation, appuyé sur une politique et une stratégie européenne qui s'est mis en place. Les diverses exemptions finissent pour couvrir l'ensemble des activités ferroviaires et le but est celui de créer une Europe des transports qui, comme l'Europe de l'Energie, est indispensable à l'autonomie de celle-ci.
Dans cette nouvelle conception, qu'exprime aussi l'Europe de la Régulation bancaire et de la Régulation énergétique, ce n'est plus le commerce qui est le principe premier, c'est l'Industrie. Les entreprises étant éventuellement coordonnées entre elles. Et ce sont les États, coordonnés éventuellement entre eux, qui développent cette Régulation Ex Ante ayant pour but cette construction.
Dans cette nouvelle Europe, dont notamment le Commissaire Thierry Breton dessine fortement les traits, le principe de concurrence demeure le principe pour le commerce, mais lorsqu'il s'agit de ces questions de régulations, il est un principe adjacent, la concurrence se développant dans la filière là où il n'entrave pas le but principal. La concurrence est alors dans une place inversée : un principe bienvenu si elle peut justifier les bénéfices qu'elle apporte dans un système où le principe premier n'est pas elle.
24 août 2022
Base Documentaire : Doctrine
► Référence générale : A., Linnet Taylor, Hellen Mukiri-Smith, Tjaša Petročnik, Laura Savolainen & Aaron Martin (2022) (Re)making data markets: an exploration of the regulatory challenges, Law, Innovation and Technology, DOI: 10.1080/17579961.2022.2113671
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19 août 2022
Compliance : sur le vif
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18 août 2022
Compliance : sur le vif
Référence complète : Frison-Roche, M.-A., "La responsabilité systémique, réponse judiciaire à la crise des opioïdes", Newsletter MAFR Law, Compliance, Regulation, 18 août 2022.
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Les jugements se succèdent aux Etats-Unis. Comme le rapporte un article paru dans le New-York Times du 17 août 2022, CVS, Walgreen and Walmart Must Pay $650.5 Million in Ohio Opioid case, "A federal judge ordered the big pharmacy chains to bear partial responsibility for the deadly drug crisis.".
L'article relate le jugement rendu par un juge fédéral de l'Ohio, qui condamne des chaînes de pharmacies, jugement contre lequel celles-ci font appel.
Il y a des milliers de cas certains jugés, d'autres en attente, certains ayant abouti contre des laboratoires, d'autres contre des chaines de pharmacies, certains ayant abouti à des condamnations, d'autres non. Les condamnations déjà prononcées ont fait l'objet d'appel de la part des entreprises condamnées, ici des chaines de pharmacies, antérieurement des laboratoires pharmaceutiques.
Ce qui est qualifiée de "crise des opioïdes" renvoie à la prescription massive d'opioïdes, initialement simplement anti-douleurs puis drogues consommées massivement par des personnes non atteintes de douleurs, produits pourtant prescrits par des médecins et vendus par des "drugstores" et autres pharmacies, ce qui a entraîné de nombreux morts par overdose, chacun sachant que les posologies n'étaient pas suivies, des "moulins à réduire en poudre les pilules étant facilement disponibles sur Internet, les consommateurs ne souffraient pas de pathologies justifiant ces prises trouvant très facilement médecins et pharmaciens pour s'approvisionner en toute légalité. Mais personne n'a eu de rôle causal direct dans ce système où tout était conforme à la réglementation car les Autorités de régulation, notamment celles en charge des médicaments ne sont pas intervenues, et les consommateurs connaissaient les risques attachés à une telle consommation.
Mais les systèmes qui ne sont pas ou mal régulés en Ex Ante sont "régulés" en Ex Post et le temps des responsabilités arrive toujours. La crise des opioïdes, ses victimes ou les proches des personnes décédées, sont désormais par milliers devant les tribunaux américains.
Selon la procédure américaine, dans le cas présent, c'est tout d'abord un jury qui, en novembre 2021, a déclaré les entreprises défenderesses partiellement responsables des décès des consommateurs d'opioïdes ; c'est maintenant le Juge fédéral de de Cleveland qui évalue les dommages et intérêts correspondant à cette responsabilité.
Ce cas est particulièrement intéressant car les consommateurs savaient pourtant ce qu'elles faisaient et les médicaments étaient bien fournis sur ordonnances légalement délivrées, les pharmacies ayant eu un comportement licite et n'ayant pas eu un rôle causal direct dans la crise qui entraîna de très nombreuses victimes. C'est d'ailleurs pourquoi d'autres juridictions, notamment en Californie, n'ont pas voulu engager leur responsabilité.
Si la juridiction de l'Ohio a pourtant retenu la responsabilité des chaines de pharmacie, c'est parce que, dans ce système que l'on pourrait "réglementairement conforme", elles ont participé à la diffusion d'une "nuisance publique" (public nuisance) en n'avertissant pas elles-mêmes sur les dangers de la substance et en délivrant massivement le produit à des personnes manifestement droguées, alimentant un système nocif.
Il s'agit donc d'un raisonnement "téléologique", s'appuyant sur les finalités, adopté dans une perspective systémique.
Dans le système libéral américain, les tribunaux peuvent ainsi engager la responsabilité et des laboratoires pharmaceutiques et des chaînes d'officines pharmaceutiques si cette perspective systémique est adoptée.
En raison du caractère systémique de ce cas car ce système de cette drogue licite a fait de très nombreux morts pourrait se dessiner une "responsabilité systémique", même dans un pays où le principe de la liberté de l'individu qui prend ses risques demeure acquis, et même si cela devait être avant tout au Régulateur public d'intervenir pour prévenir, informer et empêcher cette hécatombe.
Pour l'instant, car le Droit de la Responsabilité est lent, les premières décisions sont prises, sont divergentes selon les différents Etats. Elles sont observées par l'ensemble du secteur médical car c'est la notion même de Responsabilité qui est ici dessinée.
Un tel raisonnement systémique pourrait être repris au-delà de ce secteur. Il pourrait ainsi être repris à propos d'un autre produit dangereux que les vendeurs et prescripteurs présentent comme sûr et profitable : les jetons, souvent appelés "cryptomonnaies". Lorsqu'arriveront les dommages massifs engendrés par la crise de ceux-ci, les victimes pourront-elles se retourner pareillement contre les prescripteurs et les vendeurs ?
Le cas est systémiquement analogue, puisqu'il s'agit de la conception que l'on peut avoir de la causalité. Il faut alors choisir de conserver la conception traditionnelle de la Responsabilité ou une conception systémique de celle-ci, qui fait peser sur les "opérateurs cruciaux" une Responsabilité non plus Ex Post mais Ex Ante. C'est un choix.
Comme le souligne l'avocat des chaines de magasins condamnés, se référant à la conception classique des conditions d'engagement de la responsabilité, les pharmaciens n'ont pas eu de rôle causal direct : (extrait de l'article") “We never manufactured or marketed opioids nor did we distribute them to the ‘pill mills’ and internet pharmacies that fueled this crisis,”".
Ils estiment donc que c'était pas à eux de faire le travail qu'en Ex Ante les Etats et les Régulateurs n'ont pas fait : (extrait de l'article) " “Instead of addressing the real causes of the opioid crisis, like pill mill doctors, illegal drugs and regulators asleep at the switch, plaintiffs’ lawyers wrongly claimed that pharmacists must second-guess doctors in a way the law never intended and many federal and state health regulators say interferes with the doctor-patient relationship. ”.
L'on peut en effet soutenir que les pharmaciens ne sont pas des régulateurs en second niveau, ils n'ont pas à gérer les défaillances des autres, à prévenir les crises systémiques.
La question est effectivement d'une part de déterminer si les opérateurs cruciaux (que sont dans le secteur médical les médecins, les pharmaciens, les laboratoires) ont ou n'ont pas un tel rôle ; et d'autre part de savoir si c'est aux juridictions de répondre à une telle question, étant observé que répondre en affirmant que les pharmaciens avaient ce rôle-là est audacieux et suppose que l'on met à leur charge une "Responsabilité Ex Ante".
Dans une perspective systémique, et parce que cela aurait évité bien des morts, l'on aurait tendance à répondre que les pharmaciens auraient dû jouer ce rôle systémique et que le Droit de la responsabilité est la branche la plus politique et la plus créative du Droit.
Mais n'oublions pas que la Cour suprême des Etats-Unis vient d'affirmer le 24 juin 2022 que le juge doit être modeste et ne pas avoir d'ambition pour les autres, y compris pas pour sauver des vies, le climat ou protéger les femmes. L'on peut donc préférer une vision plus traditionnelle du Droit de la responsabilité où celui qui ferme les yeux et n'agit pas alors qu'il est au cœur du système n'est pas responsable dès l'instant qu'on ne lui en a pas expressément confié la tâche. .
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🔴Sur la comparaison du droit français appliqué à cette cause systémique des opioïdes : Th. Thouret, 📝Le pharmacien, un "opérateur crucial" pour prévenir une crise des opiacés en France, 2020
🔴Sur la notion même de "cause systémique", telle que les juridictions doivent les appréhender : 𝒎𝒂𝒇𝒓, M.-A. Frison-Roche, 🎥 𝑳'𝒉𝒚𝒑𝒐𝒕𝒉è𝒔𝒆 𝒅𝒆 𝒍𝒂 𝒄𝒂𝒕é𝒈𝒐𝒓𝒊𝒆 𝒅𝒆𝒔 𝒄𝒂𝒖𝒔𝒆𝒔 𝒔𝒚𝒔𝒕é𝒎𝒊𝒒𝒖𝒆𝒔, 2022
🔴sur la notion de "Responsabilité Ex Ante" : 𝒎𝒂𝒇𝒓, 📝La Responsabilité Ex Ante, pilier du Droit de la Compliance, 2022
12 août 2022
Compliance : sur le vif
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8 août 2022
Compliance : sur le vif
Référence complète : Frison-Roche, M.-A., "Rendre plus coûteux l'accès au marché de la Haine, Newsletter MAFR Law, Compliance", Regulation, 8 août 2022.
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2 août 2022
Publications
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► Référence complète : M.-A. Frison-Roche, Le juge, l'obligation de compliance et l'entreprise. Prolégomènes pour le système probatoire de la compliance, document de travail, août 2022
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📝ce document de travail a été élaboré pour servir de base à un article : "Le juge, l'obligation de compliance et l'entreprise. Le système probatoire de la compliance".
📕publié dans sa version française dans l'ouvrage La juridictionnalisation de la Compliance, dans la collection 📚Régulations & Compliance
📘dans sa version anglaise dans l'ouvrage Compliance Jurisdictionalisation, dans la collection 📚Compliance & Regulation
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► Résumé du document de travail : Pour articuler le système probatoire de la compliance, il convient d'admettre en préalable que le Droit de la preuve est un système à part entière, construit sur un « carré probatoire » fonctionnant quelle que soit la situation, et qu’à première vue le Droit de la Compliance le rejette, étant incompatible avec des principes probatoires majeurs, dès l'instant que l'on définit la Compliance comme l’obligation qu’auraient les entreprises de donner à voir (ce qui relève de la preuve) leur respect de toute la réglementation qui leur est applicable.
Mais heureusement, la Compliance ne doit pas recevoir cette définition. Le Droit de la Compliance consiste dans l’ensemble des principes, institutions, règles et décisions qui, dans une alliance entre Autorités publiques et entreprises cruciales, tend d’une façon substantielle à la concrétisation de Buts Monumentaux. Branche du Droit Ex Ante protectrice des systèmes et des êtres humains qui y sont impliqués, le Droit de la Compliance a pour objet de détecter et de prévenir pour qu’à l’avenir les systèmes soient moins délétères qu’ils ne seraient si l’on ne fait rien, voire soient meilleurs.
De cette action exigée, qui requiert mises en place de structures et séries de comportements, un système probatoire spécifique se dégage. Il est composé en premier lieu d’objets de preuve spécifique, constitués d’une part par les structures et d’autre part par les comportements. En deuxième lieu, la spécificité de la compliance, souvent dénoncée, tient dans la charge de la preuve, dont le fardeau repose sur l’entreprise, mais il faut analyser les interférences avec les autres branches du Droit, que la compliance ne peut avoir détruites. En troisième lieu, l’ampleur des enjeux probatoires est telle que les moyens de preuve se sont multipliés, selon le tryptique de l’effectivité, efficacité et efficience attendues du système de compliance lui-même au regard des buts monumentaux (et non de la réglementation). En quatrième lieu, parce que le Droit de la Compliance est une branche du Droit Ex Ante et que le Juge y est pourtant au centre, il est logique que tous les efforts portent sur la préconstitution des preuves.
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🔓Lire les développements ci-dessous ⤵️
1 août 2022
Compliance : sur le vif
► Référence complète : Frison-Roche, M.A., "Quand on s'intéresse à la Compliance, lire "La Haine" de Günther Anders", Newsletter MAFR Law, Compliance, Regulation, 1ier août 2022.
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► Introduction de l'article : Philosophe allemand, Günter Anders connut la Seconde Guerre mondiale, dût quitter l'Allemagne et vécut dans plusieurs pays. C'est avant tout un philosophe moral, habité par le pessimisme et l'idée que le nazisme n'était qu'une répétition générale, plutôt artisanale, de ce que nous attend : L'obsolescence de l'homme, son livre-maître qui en 1956 décrit le système économique comme ce qui broie les êtres humains en les réduisant à n'être plus que des êtres qui entretiennent des machines qui produisent des produits inutiles qu'ils consomment, les humains n'étant eux-mêmes que des machines désirantes.
En 1985 dans un volume paru en langue allemande et composé d'articles tous consacrés au thème de La haine, il donna comme contribution les éléments de travail de ce qu'il avait conçu comme dernière partie de son oeuvre démontrant l'appareillage obtenant "l'obsolescence de l'homme", dernier livre qu'il ne publia jamais.
Extrait de ce volume, ces documents de travail furent traduits en français et présentés par Philippe Ivernel : le titre en est La Haine.
Lire la suite de l'article ci-dessous⤵️
20 juillet 2022
Base Documentaire : Doctrine
Référence complète : Rharrabi, H, L"La compliance en droit marocain : une notion en devenir", Remald, juin-juillet 2022.
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20 juillet 2022
Base Documentaire : Soft Law
► Référence complète : Autorité de régulation des transports (ART), Six ans de régulation des transports (2016-2022). De l'ARAFER à l'ART, juillet 2022.
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17 juillet 2022
Compliance : sur le vif
7 juillet 2022
Aventures de l'Ogre Compliance
6 juillet 2022
Base Documentaire : Doctrine
► Référence complète : C. Lemaire & F. Martucci (dir.), Liber Amicorum Laurence Idot. Concurrence et Europe, vol. I, préf. C. Lemaire & F. Martucci, avant-propos B. Lasserre, Concurrences, 2022, 500 p.
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► Résumé de l'ouvrage (fait par l'éditeur) : "La carrière de Mme le Professeur Laurence Idot appelle un hommage. Sa pensée a mûri le droit de la concurrence, tant par ses écrits que ses enseignements ou son activité à l'Autorité de la concurrence. Aucun de ses anciens collègues ou étudiants n'est resté insensible à sa finesse d'esprit et sa personnalité exceptionnelle. L'impact de sa pensée, de son enseignement et de ses consultations justifie que, dans la plus pure tradition universitaire, des Mélanges lui soient dédiés.
Théoricienne confrontée à la réalité des dossiers, Laurence Idot a marqué la recherche par son analyse fine et habile des interactions entre le droit de la concurrence, le droit de l'Union européenne, et le droit de l'arbitrage et le droit international. A l'heure du développement des recours à l'arbitrage international et de la croissance du droit européen de la concurrence, ses écrits et sa compréhension du droit conservent leur actualité.
L'originalité du parcours du Professeur Idot tient aux chemins qu'elle a tracés dans des droits en développement : le droit européen d'un côté, le droit de la concurrence de l'autre - auxquels elle a chacun consacré une revue. Les destins de Concurrence et Europe sont désormais entremêlés.".
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📝lire l'article de Marie-Anne Frison-Roche : "L'appui du Droit de la Compliance pour la maîtrise quotidienne du Droit de la concurrence"
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6 juillet 2022
Base Documentaire : Doctrine
► Référence complète : L. d'Avout, "L'arbitrabilité sous condition : réflexions au départ de l'antitrust", in C. Lemaire & F. Martucci (dir.), Liber Amicorum Laurence Idot. Concurrence et Europe, vol. I, préf. C. Lemaire & F. Martucci, avant-propos B. Lasserre, Concurrences, 2022, pp. 177-192
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► Résumé de l'article (fait par l'auteur) : "À travers l'arbitrabilité, l'on répond en principe de façon binaire à la question de l'admissibilité du règlement privatisé d'un litige. Ce concept juridique permet-il également de restreindre les marges de manœuvre des arbitres internationaux dans l'exercice de leur mission juridictionnelle, par une admission de l'arbitrage subordonnée au respect d'un régime juridique donné (loi étatique, convention internationale, etc.) ? Une réponse positive peut être formulée dans certains cas, moyennant l'étude des liens entre la règle d'arbitrabilité et le contrôle étatique subséquent des sentences arbitrales. Lorsque le contrôle de compatibilité des sentences est effectué non seulement au regard de principes mais aussi de certaines règles internationalement impératives, telles celles du droit de la concurrence, l'on peut conclure en amont à la subordination de l'arbitrabilité du litige au respect de ces règles. Une corrélation ou un lien causal, apparaît ainsi (ou est susceptible d'apparaître), dans certains secteurs économiques sensibles, entre la définition par les collectivités publiques des litiges susceptibles d'être arbitrés, l'encadrement consécutif de la mission du juge privé choisi par les parties et le contrôle, ultérieur par les juges étatiques, de l'admissibilité du produit de cette justice privée. Ce lien causal exprime une arbitrabilité de type conditionnel qui, loin de fragiliser le règlement privatisé des litiges internationaux, oeuvre au contraire à l'insertion cohérente de l'arbitrage dans le système plus général du contentieux transnational.".
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🦉Cet article est accessible en texte intégral pour les personnes inscrites aux enseignements de la Professeure Marie-Anne Frison-Roche
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6 juillet 2022
Aventures de l'Ogre Compliance
6 juillet 2022
Publications
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► Référence complète : M.-A. Frison-Roche, "L'appui du Droit de la Compliance pour la maîtrise quotidienne du Droit de la concurrence", in C. Lemaire & F. Martucci (dir.), Liber Amicorum Laurence Idot. Concurrence et Europe, vol. I, préf. C. Lemaire & F. Martucci, avant-propos B. Lasserre, Concurrences, 2022, pp. 369-374
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► Résumé de l'article : Le Droit de la concurrence est devenu si énorme et « réglementaire » qu’on finirait par renoncer à vouloir le saisir dans son ensemble, préférant devenir spécialiste de l’une de ses parties. Cela serait perdre de vue la raison simple et forte qui unit l’ensemble et lui donne son souffle :liberté.
Liberté éprouvée par la personne dans son action économique quotidienne, liberté gardée par le Droit de la concurrence, revenant toujours à son principe : la libre concurrence. Raison pour laquelle l’Union européenne fait grande place à la concurrence. Pour la rendre et la garder effective, la « politique de la concurrence » s’articule au Droit de la concurrence mais si autorités et juges ne font pas reproche aux entreprises leur puissance, ils ne s’appuient pas sur celle-ci.
Pour ce faire, il faut alors être épaulé par le Droit de la Compliance, qui incite fortement les entreprises à agir pour l’effectivité et la promotion des principes concurrentiels. Le Droit de la concurrence glisse ainsi de l’Ex Post vers l’Ex Ante, les engagements des entreprises conduisant celles-ci à cesser d’être passives et punies pour devenir des acteurs convaincus et eux-mêmes pédagogues. De quoi plaire à une grande professeure de Droit de la concurrence, à laquelle hommage est ici rendu.
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📗lire la table des matières des Mélanges
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🚧lire le document de travail bilingue sur la base duquel cet article a été élaboré, doté de développements supplémentaires, de références techniques et de liens hypertextes
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6 juillet 2022
Base Documentaire : Doctrine
► Référence complète : A. Danis-Fatome, "The proposal for a European Directive on the duty of vigilance: brief views on civil liability" ("La proposition de directive européenne sur le devoir de vigilance : brèves notes sur la responsabilité civile"), International Business Law Journal, 5, 2022, p. 489-497.
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► Résumé de l'article (fait par le Journal of Regulation & Compliance) :
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5 juillet 2022
Interviews
► Référence complète : Frison-Roche, M.-A., entretien avec Olivia Dufour, « La Cour suprême a déclenché la bombe de la sécession. Que faire ? », 5 juillet 2022.
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💬 Entretien mené à propos du sens, de la valeur et de la portée système de l'arrêt Dobbs v. Jackson rendu par la Cour suprême des Etats-Unis le 24 juin 2022.
► Présentation de l'interview par Olivia Dufour : Alors que l'arrêt Dobbs v. Jackson du 24 juin 2022 de la Cour suprême des Etats-Unis sur l'avortement n'en finit pas de susciter l'émotion, déjà d'autres droits fondamentaux menacent de perdre leur qualité de droit constitutionnel fédéral. A commencer par le mariage homosexuel. Mais ce n'est pas la seule conséquence de cette nouvelle jurisprudence ultra-conservatrice. Pour le professeur Marie-Anne Frison-Roche, ce qui s'apparente à un "suicide institutionnel" de la part de la Cour a déclenché un mouvement de sécession. En d'autres termes, les Etats-Unis sont en passe de se désunir. Pour autant, rien n'est perdu. Explications.
Les questions posées étaient les suivantes :
Actu-Juridique : L'arrêt de la Cour suprême américaine sur l'avortement a beaucoup ému en France. En réalité, cela ne semble être que le début d'un mouvement de fond. Qu'en est-il ❓ ?
🔑Réponse MaFR
Actu-Juridique : Qu'est-ce que cette conception originaliste qui semble désormais être celle de la Cour suprême 'arrêt de la Cour suprême américaine sur l'avortement a beaucoup ému en France. En réalité, cela ne semble être que le début d'un mouvement de fond. Qu'en est-il ❓
🔑Réponse MaFR
Actu-Juridique : On comprend donc que l'avortement n'ayant pas été envisagé au XIX siècle, il ne peut pas être protégé par la Constitution au XXIème siècle❓
🔑Réponse MaFR
Actu-Juridique : Cela engendre donc un séisme dépassant de loin les seules conséquence d'un revirement de jurisprudence ❓
🔑Réponse MaFR
Actu-Juridique : C'est donc en vertu de cette logique que le port d'arme est qualifié, contrairement au droit à l'avortement, de droit constitutionnel à valeur fédérale ❓
🔑Réponse MaFR
Actu-Juridique : Est-ce également cette nouvelle logique qui a présidé à l'arrêt du 30 juin 2022 sur la lutte contre les gaz à effet de serre ❓
🔑Réponse MaFR
Actu-Juridique : En quoi l'arrêt sur l'avortement peut-il bouleverser les Etats-Unis ❓
🔑Réponse MaFR
Actu-Juridique : Actuellement, l'opinion semble à la fois sidérée et impuissante, faut-il se résoudre à voir prospérer cette nouvelle jurisprudence ❓
🔑Réponse MaFR
Actu-Juridique : En France, cet arrêt a suscité la crainte que l'avortement ne soit remis en cause ici aussi et certains réclament l'inscription du droit à l'IVG dans la Constitution. Est-ce une bonne idée ❓
🔑Réponse MaFR
Actu-Juridique : Mais alors que faire pour protéger le droit à l'IVG en France ❓
🔑Réponse MaFR
Actu-Juridique : Revenons aux Etats-Unis, comment empêcher que la Cour suprême ne revienne sur le caractère fédéral de nombreux droits ? Le Congrès pourrait-il intervenir ❓
🔑Réponse MaFR
Actu-Juridique :Une telle situation pourrait-elle se produire en Europe ❓
🔑Réponse MaFR
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5 juillet 2022
Aventures de l'Ogre Compliance