9 février 2024

Organisation de manifestations scientifiques

🧱Co-organisation du Colloque 🧮L'arbitrage international en renfort de l'Obligation de Compliance

par Marie-Anne Frison-Roche

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 Référence complète : L. Aynès, M.-A. Frison-Roche, J.-B. Racine et E. Silva-Romero (dir.), L'arbitrage international en renfort de l'obligation de ComplianceJournal of Regulation & Compliance (JoRC) et Institut de Droit des affaires internationales de la Chambre de commerce internationale (Institut), Conseil Économique Social et Environnemental (CESE), Paris, 9 février 2024

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🏗️Ce colloque s'inscrit dans le cycle de colloques organisé par le Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et ses Universités partenaires, portant en 2023-2024 sur le thème général de L'Obligation de Compliance

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📚Les travaux s'inséreront ensuite dans les ouvrages : 

📕L'obligation de Compliance, à paraître dans la collection 📚Régulations & Compliance, coéditée par le Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, publié en langue française

📘Compliance Obligation, à paraître dans la collection 📚Compliance & Regulation, coéditée par le Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Bruylant, publié en langue anglaise

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► Présentation générale du colloque : "L'obligation de Compliance" peut paraître éloignée de l'arbitrage international si l'on ne conçoit le Droit de la Compliance qu'à travers les réglementations contraignantes, voire qu'à travers les Droits pénaux nationaux. L'arbitrage n'y aurait alors de points de contact que d'une façon répulsive, lorsqu'une personne prétend obtenir devant un tribunal arbitral exécution d'un contrat qui méconnait un but visé par la Compliance, par exemple la lutte contre la corruption ou le blanchiment d'argent, lesquels constituent des infractions. C'est donc sous un angle négatif que le croisement s'est fait.

Que l'arbitrage respecte la puissance du Droit pénal n'a rien de nouveau, ; que la puissance, notamment probatoire, de la Compliance, dans ses outils de détection et de prévention, l'y aide et engendre des difficultés d'articulation, c'est également acquis et discuté.

Mais l'obligation de Compliance vise des Buts Monumentaux, en matière de droits humains et d'environnement qui, notamment dans l'économie des chaînes de valeur, prennent la forme juridique de clauses de compliance, voire de contrats de compliance, ou d'engagements divers, dont les parties peuvent demander l'exécution à l'arbitre international. Elles le feront d'autant plus qu'il est souvent le seul juge international, voire global, disponible.

Le maniement qu'il fera alors du droit des obligations (contrat, quasi-contrat, responsabilité) vient en renfort de l'obligation de Compliance. L'arbitrage international trouve alors lui-même un nouvel espace de déploiement.

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► Interviennent : 

🎤Laurent Aynès, professeur émérite de Droit de l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, avocat à la Cour, Darrois Villey Maillot Brochier

🎤 Marie-Anne Frison-Roche, professeure de Droit de la Régulation et de la Compliance, directrice du Journal of Regulation & Compliance (JoRC)

🎤Jean-François Guillemin, ancien secrétaire général du groupe Bouygues

🎤 Christophe Lapp, avocat à la Cour, Advant Altana

🎤 Jean-Baptiste Racine, professeur de Droit à l'Université Paris Panthéon-Assas (Paris 2)

🎤 Eduardo Silva-Romero, président de l'Institut du Droit des Affaires Internationales de la CCI (Institut), avocat à la Cour, Wordstone

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🧮Lire une présentation détaillée de la manifestation ci-dessous⤵️

L'arbitrage international en renfort

de l'obligation de Compliance

sous la direction scientifique de

Laurent Aynès, Marie-Anne Frison-Roche, Jean-Baptiste Racine et Eduardo Silva-Romero

 

Vendredi 9 février 2024, Paris

Conseil Économique Social et Environnemental (CESE)

9 Place d'Iéna, 75016 Paris

 

9h-19h15. Accueil 

 

9h15-9h30. Ouverture des travaux, par Eduardo Silva-Romero, Président de l'Institut du Droit des Affaires Internationales de la CCI (Institut), Avocat à la Cour, Wordstone 

 

9h30-9h45. Préalable : ce qu’est l’obligation de Compliance, par Marie-Anne Frison-Roche, Professeure de Droit de la Régulation et de la Compliance, directrice du Journal of Regulation & Compliance (JoRC)

  • J'ai traité d'une façon préalable la définition même de l'Obligation de Compliance.
  • Après avoir montré que les rapports entre le Droit de la Compliance et l'Arbitrage international vont naturellement se développer, parce que les entreprises assujetties sont internationales, qu'elles contractualisent leurs obligations légales de Compliance et que la Compliance se juridictionnalise📎!footnote-3367, l'arbitre en étant le juge naturel puisqu'il est un juge global et le juge du contrat, j'ai rappelé que le Droit de la Compliance ne fait pas que charger l'arbitrage de faire obstacle à des maux, comme les pactes de corruption, mais qu'il engendre des obligations positives pour les entreprises : détecter et prévenir des comportements dont l'effet systémique est délétère.
    Cette culture de compliance s'opère soit par des contrats de compliance📎!footnote-3365 (qui externalisent le traitement de l'audit, des alertes, de l'élaboration des plans, etc.), soit par des clauses de compliance📎!footnote-3365, qui s'insèrent dans des contrats de distribution, de fourniture, etc. ; les clauses compromissoires s'y articulent. Ainsi, l'alliance entre Compliance et Contrat est un mode indirect d'alliance entre Arbitrage et Obligation de Compliance.
  • L'obligation de Compliance qui se concrétise alors consiste pour l'entreprise non pas à rendre effectives en Ex Ante toutes les réglementations qui lui sont applicables (conception de la conformité à la fois déraisonnable, aveugle et impossible), mais à faire ses meilleurs efforts, qu'elle doit donner à voir (cf. système probatoire de la Compliance📎!footnote-3368) pour atteindre des Buts Monumentaux.
    Ces Buts Monumentaux sont systémiques. Il s'agit de protéger les systèmes de l'effondrement (Buts Monumentaux Négatifs) ou de les rendre meilleurs (Buts Monumentaux Positifs)📎!footnote-3369. Par une responsabilisation de l'entreprise, via ce Droit ex ante dont l'objet est le futur, sont combattus les maux systémiques de la corruption, du blanchiment, de la discrimination, du changement climatique et de la haine, trouve ainsi une unité substantielle. Les Buts Monumentaux Positifs visent à engendrer dans les systèmes, qu'ils soient bancaires, financiers, numériques, climatiques, etc., de la durabilité, de la sécurité, le respect des êtres humains, etc.
  • L'office du juge, et donc aussi de l'arbitre, en sont renouvelés.

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9h45-10h15. Préalable : ce qu'est un engagement, par Marie-Anne Frison-Roche, Professeure de Droit de la Régulation et de la Compliance, directrice du Journal of Regulation & Compliance (JoRC)

  • Après avoir défini l'Obligation de Compliance, j'ai entrepris de définir ce qu'est un engagement.
  • Que les engagements, en tant que paroles, constituent des faits pouvant engager la responsabilité des entreprises s'il y a incohérences, ou mensonges, nul n'en doute. La question est aujourd'hui celle de savoir si un engagement peut constituer un acte juridique, liant ex ante.
  • Les entreprises s'engagent, soit pour concrétiser leurs obligations légales de Compliance, ce qui n'est alors qu'une obéissance à la loi, soit pour exprimer une volonté propre, soit pour elles-mêmes, soit pour autrui. Les cas sont souvent confondus, alors que les portées ne sont pas les mêmes.
  • Si l'engagement prend la forme d'un contrat, la Compliance est concernée si le contrat est manié comme Outil de Compliance Ex Ante📎!footnote-3370, soit que l'ensemble du contrat ait cet objet, soit qu'une clause de compliance soit insérée, une clause compromissoire pouvant s'y articuler.
  • L'engagement, notion venue plutôt de l'Économie de la Regulation, a été pensé entre une Autorité de Régulation et une Entreprise : c'est la décision unilatérale de l'Autorité qui donne une force juridique à l'engagement. La jurisprudence le confirme (Conseil d'État📎!footnote-3371 et Conseil constitutionnel📎!footnote-3372) et cela est particulièrement net en Droit de la concurrence, mais cela est également vrai de la convention judiciaire d'intérêt public (CJIP).
  • Si l'engagement est central en Compliance, notamment en Vigilance, c'est parce que le Droit de la Compliance est le prolongement du Droit de la Régulation📎!footnote-3373. L'entreprise est instituée de force par la Compliance régulateur, notamment dans les chaines de valeur, ou sur les espaces numériques (DSA).
  • Dans l'élaboration d'un plan, l'entreprise exécute son obligation légale. Mais si l'on devait considérer qu'il s'agit d'un engagement, alors il faudrait aussi considérer que le plan résulte de sa volonté, qu'elle doit dans son élaboration consulter les parties prenantes mais que la source du plan est sa volonté : les dispositions ne sont pas des stipulations, ne sont pas des applications de la loi, mais des dispositions volontaires unilatérales.
    A ce titre, et parce que sa source est la volonté de l'entreprise (ce qui n'empêche pas sa co-construction), un plan pourrait contenir une "offre graduée" d'arbitrage.
    Cette offre peut être insérée dans des engagements moins encadrés par la loi, comme tous ceux pris au titre de la RSE.

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Il était initialement prévu que j'intervienne sur le thème Le renforcement des engagements de Compliance par le renvoi Ex Ante à l'arbitrage international, mais il a été convenu avec les autres organisateurs du colloque qu'après avoir définit la notion d'Obligation de Compliance je recentre mon second propos, évoqué ci-avant, sur ce qu'est un Engagement, préalable indispensable pour traiter le thème de L'arbitrage international en renfort de l'obligation de Compliance. Les développements sur Le renforcement des engagements de Compliance par le renvoi Ex Ante à l'arbitrage international figureront dans les ouvrages à paraître : L'obligation de Compliance (en français), Compliance Obligation (en anglais). Néanmoins, si j'avais traité ce thème, j'aurai évoqué les points suivants : 

  • Aborder l'insertion d'une offre d'arbitrage en matière de Compliance suppose de l'envisager aussi bien dans un contrat que dans un engagement non-contractuel, et d'étudier à propos de quelle catégorie d'obligation de Compliance l'offre peut s'appliquer.
  • Cette insertion gagne à prendre la forme d'une "offre graduée", dans un crescendo organisé par l'entreprise en ex ante et offert aux parties prenantes : conciliation, médiation et arbitrage, dans des "cercles de confiance"📎!footnote-3364. Cela est porté par l'actuelle politique de l'amiable.
  • Il en est résulté une préparation comprenant de longs développements "préalables" sur ce qu'est un "engagement", sans lesquels il me paraissait difficile de parler concrètement de l'insertion efficace d'une offre d'arbitrage si l'on ne sait si tels ou tels liens ou paroles ont un effet de contrainte sur celui qui les émet à l'égard de celui qui en bénéficie. Ayant discuté avec les autres intervenants, il est apparu qu'il était plus efficace et qu'il fallait plutôt faire une intervention consacrée à la seule question de la définition en Droit de l'engagement. Nous avons donc décidé d'affecter ce second temps de parole à la notion d'engagement. L'écrit n'ayant pas les mêmes contraintes, il reprendra la construction initiale, insistant sur les différents supports, soit des contrats de compliance, soit des associations avec des clauses de compliance, portant sur différentes obligations de Compliance, notamment sur l'information ou l'audit ou la Vigilance📎!footnote-3365, car l'entreprise doit avoir le pouvoir juridique correspondant à la mission dont l'État la charge à travers la Compliance📎!footnote-3366.
  • La rédaction de cette offre doit être soigneusement faite pour expliciter le but de cette offre, son organisation devant prouver la réalité de ce but : donner accès à un juge aux personnes concernées par l'activité de l'entreprise et non pas le bloquer.
  • Cela sera donc disponible d'une façon détaillée dans les ouvrages à paraître :

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10h15-10h45. L’exemple du secteur de la construction, par Jean-François Guillemin, ancien Secrétaire général du groupe Bouygues et Christophe Lapp, Avocat à la Cour, Advant Altana

  • Jean-François Guillemin et Christophe Lapp ont abordé le sujet très concret du développement déjà acquis des mécanismes de Compliance, et de ce qui pourrait, de façon adéquate, y répondre, à savoir l'arbitrage international, en prenant l'exemple du secteur de la construction.
  • En effet, Jean-François Guillemin a rappelé qu'en matière de construction l'arbitrage international est une technique de règlement des litiges très usuellement pratiqué. Il souligne aussi qu'il est comme tous les autres concernés par les textes de Compliance et que l'arbitrage ne doit pas blanchir la corruption ou blanchir le blanchiment. Mais il insiste sur le fait que la Vigilance, qui est une technique de Compliance, notamment avec l'adoption de la CS3D, développe aujourd'hui un ordre public au niveau européen qui va être très lourd pour les entreprises assujetties et très difficile à mettre en place, notamment à travers les contrats qui sont établis, parfois avec des centaines de contractants, pour construire des infrastructures complexes. Ce texte oblige notamment à des résiliations, ce qui va poser des difficultés, que l'on retrouvera dans les arbitrages.
  • Christophe Lapp reprend le sujet en soulignant que dans ce profond mouvement de la Compliance, l'arbitrage peut être inséré à travers des contrats, ce qui va amener les arbitres à intégrer des considérations liées aux Buts Monumentaux de la Compliance, comme le changement climatique et les droits humains, obligeant à revoir la conception même du litige.
  • Plus encore, la voie de l'arbitrage peut, et va, s'insérer dans des engagements extracontractuels. Il se demande si de tels engagements n'auraient pas une dimension réglementaire, engendrant dès lors des contentieux objectifs. Cela serait d'autant plus concevable que, pour prendre l'exemple de la loi dite "vigilance" de 2017 l'État a délégué son autorité, institué l'entreprise comme une sorte de régulateur délégué.
  • Face à cela, l'arbitre doit prendre en considération non seulement ce qui l'institue arbitre mais encore tout ce que l'entreprise émet, par exemple dans la chaine de valeur, l'orateur citant un code d'éthique demandant à tout fournisseur d'être exemplaire.
    L'arbitrage, devenant alors plus propice à la médiation, devrait alors devenir plus favorable à devenir un forum pour que les parties prenantes débattent, ce qui conduit à reconsidérer la notion même de litige.

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10h45-11h. Discussion

 

11h-11h30. L’arbitre, juge, superviseur, accompagnateur ?, par Jean-Baptiste Racine, Professeur à l'Université Paris Panthéon-Assas (Paris 2)

  • Merci à Jean-Baptiste Racine d'avoir traité le sujet si difficile de l'office de l'arbitre pour renforcer l'obligation de Compliance !
  • Il rappelle que puisque l'office du juge mute face au contentieux de Compliance, parce qu'un contentieux de Compliance va aussi apparaître en arbitrage international, le rôle de l'arbitre doit muter. Mais la difficulté majeure vient du fait que les pouvoirs de l'arbitre sont façonnés par la volonté des parties au contrat. Cela peut être pourtant dépassé.
  • En tant qu'il est juge, l'arbitre va apprécier l'obligation de Compliance, par exemple en matière d'obligation de détecter et de prévenir la corruption ou les atteintes aux droits humains. Malgré la compétence exclusive du Tribunal judiciaire de Paris en matière de Vigilance, les stipulations organisant celle-ci peuvent être renforcées par une clause compromissoire, les juges jugeant de la conformité à la stipulation, et l'on pourrait admettre une disposition dans les plans de vigilance qui renverrait à un arbitrage.
  • Mais les Buts Monumentaux de la Compliance incitent à renouveler les fonctions de l'arbitre, à en faire plus qu'un juge, allant au-delà de l'office purement juridictionnel. De la même façon qu'un arbitre peut être chargé de compléter ou modifier un contrat. Si l'on élargit la notion de litige, en songeant notamment aux procédures d'engagement en Droit de la concurrence, qui engendrent des droits pour les tiers pouvant déclencher des arbitrages, cela est concevable. Certes, ce que des auteurs ont qualifié d'"externalisation du contrôle des engagements", faisant de l'arbitre un auxiliaire de l'autorité publique, engendre un "arbitrage régulatoire" (Laurence Idot), transformant l'office de l'arbitre.
    L'office de l'arbitre change alors et, dans ce qu'est la Compliance, de multiples tiers seraient appelés à intervenir (comme en Compliance), comme des amicus curiae. L'arbitre devient alors davantage un accompagnateur des projets à long terme.
    Ainsi, dans la directive CS3D, les mesures correctives qui sont prévues et ordonnées par la future autorité pourraient sans doute prendre la forme d'un arbitrage ainsi conçu.
  • Une fois saisi, l'arbitre devrait non seulement réparer le passé, mais se soucier du futur, ce qui lui est difficile puisqu'il disparait une fois la sentence rendue. Mais il peut nommer un expert qui va suivre l'exécution d'une mesure et inciter les parties à s'accorder pour revenir devant lui en cas de difficulté d'exécution, ce qui rejoint la technique des dispute boards. Usuels en construction, l'on pourrait l'étendre par exemple pour les droits humains.

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11h30-12h. La condamnation en nature par le tribunal arbitral, renfort de l'obligation de Compliance, par Eduardo Silva-Romero, Président de l'Institut du Droit des Affaires Internationales de la CCI (Institut), Avocat à la Cour, Wordstone

  • Eduardo Silva-Romero a développé comment l'arbitre peut ordonner l'exécution de l'obligation de Compliance, laquelle est une obligation de faire, obligation en nature, par exemple de continuer les travaux, de restaurer un équilibre climatique, de mettre en place une remédiation, etc.
  • Cela est en effet essentiel, puisque le Droit de la Compliance se définit par une série d'obligations actives et que classiquement l'arbitrage, étant davantage Ex Post qu'Ex Ante, il se résout par une obligation d'indemniser et non pas par des obligations en nature, pour l'exécution desquelles l'arbitre est plus encore démuni que ne l'est le juge.
  • Eduardo Silva-Romero distingue deux hypothèses.
    • La première est celle de la condamnation par nature provisoire, lorsque l'arbitre est sollicité pour prononcer des mesures provisoires et conservatoires. En Droit français l'article 1468 du Code de procédure civile donne à l'arbitre pouvoir de prononcer des astreintes, mais des droits étrangers, par exemple Droit suisse est plus réticent. La question porte sur la liquidation de l'astreinte, ce qui relève d'un imperium mixte, la liquidation relevant davantage de l'exécution de la sentence, ce qui renvoie au juge de l'exécution.
    • La seconde question est celle de la condamnation à exécuter une obligation en nature, via le dispositif de l'astreinte, dans la sentence finale. Il faut distinguer l'arbitrage commercial et l'arbitrage d'investissement.
      La question semble encore discutée concernant l'arbitrage commercial. En ce qui concerne l'arbitrage d'investissement, cela semble exclu, une sentence ayant considéré que cela reviendrait à imposer à un État de ne pas exproprier, la seule voie demeurant donc la condamnation par équivalent pécuniaire.
      L'orateur évoque tout de même la perspective d'attribution de dommages et intérêts conditionnels, la condition étant une remédiation, par exemple la réparation en nature d'un dommage environnemental, mais il faudrait sans doute dans l'arbitrage d'investissement une évolution des traités et de la pensée des arbitres.
  • Il apparait ainsi que l'arbitrage a déjà quelques outils pour renforcer l'obligation de Compliance. Mais l'influence de la Compliance doit donner plus de pouvoir aux arbitres. Pour cela, il faut sans doute aussi que la rédaction des clauses compromissoires évolue, dans leur articulation avec les clauses de compliance et intègre ces pouvoirs pour intégrer plus expressément les Buts Monumentaux de la Compliance, sauf à une loi de le faire.

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12h-12h15. Discussion 

 

12h15-12h45. Observations finales, par Laurent Aynès, Professeur émérite à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Avocat à la Cour, Darrois Villey Maillot Brochier

  • Merci à Laurent Aynès d'avoir opéré la synthèse de ce colloque !
  • Il rappelle que l'arbitre intervient à partir d'une convention d'arbitrage et un litige. C'est à travers cela que l'arbitre peut d'une façon indirecte renforcer l'obligation de Compliance et appliquer la norme de Compliance, à l'occasion du règlement du litige. Cela advient lorsque le contrat prévoit à la fois une obligation de Compliance, par exemple en matière de Vigilance, et une clause compromissoire, et qu'une résiliation intervient, ou lorsqu'il s'agit de protéger l'investisseur et que celui-ci demande à l'arbitre le respect par l'État de droits humains comme mesure provisoire.
  • Pour trancher, l'arbitre peut se référer aux Buts Monumentaux, qui sont des normes évocables à travers des normes qui ont pour objet de prévenir les atteintes à ces objectifs et même si leur nature est incertaine, l’arbitre peut se référer à des engagements. En effet, même si leur nature est incertaine, les engagements font partie des normes auxquelles l’arbitre peut se référer.
  • Une partie peut demander à l'arbitre l'exécution d'une obligation de Compliance, ce qui engendre les difficultés liées au prononcé de l'astreinte. En dehors de l’astreinte, il n'y a de raison de cantonner l'arbitre dans les mesures seulement pécuniaires et il doit pouvoir imposer des mesures en nature.
  • Pour aller plus loin, et faire de l'arbitrage un organe direct de la Compliance, la question est ouverte car il faut aller au-delà de son office traditionnel pour en faire un "auxiliaire de la Compliance". Il faut aller au-delà du litige pour aller vers le règlement du conflit, notamment vers une juridiction gracieuse ; il faudrait aller vers une sorte d'arbitrage naturel. Mais si la voie de la compétence donnée par les clauses compromissoires et les conventions est plus immédiate, l'on peut y songer. En tout cas, cela ne peut s'opérer qu'avec le consentement qui donne compétence à l'arbitre. Une offre d'arbitrage pourrait être lancée par l'entreprise, idée là-aussi à poursuivre.
  • Laurent Aynès conclut que cela traduit une très profonde transformation des sources du Droit, de son rôle et de l'office du Juge. Avec l'avènement progressif d'une justice sans frontières, dont l'autorité ne procède plus de l'État mais de l'élection des parties.

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12h45. Fin des travaux 

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