7 octobre 2015

Enseignements : La personne entre le droit et l’économie

Le mot "valeur" est amphibologique. En droit, il montre la proximité de celui-ci avec la morale : évoquant les "valeurs" du droit, on se réfère le plus souvent à ce qui en forme les principes fondamentaux, dont le caractère essentiel justifie qu'on n'ait même plus à les justifier. Ainsi, tout être humain est une personne. En tant que telle, elle a une valeur égale à celle d'une autre personne. En tant que telle, corrélativement et inversement, elle a une valeur incommensurable avec tout ce qui n'est pas une personnes, les choses et les biens, qui "valent" toujours moins d'une personne. Tout vaut moins qu'une personne.

Une fois cela dit, ces belles affirmations principielles dites, l'être humain qui constitue par sa seule existence une personne n'est pas désincarnée. Ainsi et par exemple, elle travaille. Selon la pensée anglaise, c'est même par son travail qu'elle est libre. Les prestations qu'elle assure lui seraient donc à ce titre indissociable. D'autres observent que la personne qui travaille, le "travailleur", est certes une personne, mais elle offre sa "force de travail" sur un espace : le "marché du travail" sur lequel des demandeurs - les entreprises, les employeurs, les exploiteurs - peuvent puiser dans cette force collective rendue disponible par ces offreurs.

Plus encore, alors que l'entreprise était définie classiquement comme un groupe de personnes ayant un projet pour la réalisation duquel elles se réunissent (entrepreneurs), la conception actuelle représente l'entreprise plus volontiers comme un "nœud de contrats" ou comme une réunion d' "actifs" (assets) : le capital financier et le "capital humain". Les personnes qui apportent leur talent, leur temps, leur énergie, etc. sont des actifs de l'entreprise, laquelle est elle-même un actif, côté.

Nul ne conteste que l'entreprise ait une "valeur", c'est-à-dire un chiffre, un nombre, résultant d'une "évaluation" de ce qu'elle représente pour les autres, ceux qui veulent potentiellement l'acheter, c'est-à-dire pour le marché lui-même. En effet, les mots "valeur" et "évaluation" et "valorisation" appartiennent à la même famille sémantique.

C'est ainsi que l'on est passé de la morale pure à la finance pure.

Aujourd'hui, c'est autour du désir, de la volonté et du consentement que la question de la valeur de la personne se réorganise. Par exemple en matière de pratique de maternité de substitution (GPA).

Mise à jour : 31 juillet 2013 (Rédaction initiale : 13 septembre 2011 )

Enseignements : Les Grandes Questions du Droit, semestre d'automne 2011

1 mai 2012

Base Documentaire : Doctrine

4 juin 2003

Publications

 Référence complète : Frison-Roche, M.-A.,  Valeurs marchandes et ordre concurrentiel, in L’ordre concurrentiel, Mélanges en l'honneur d'Antoine Pirovano, éd. Frison-Roche, 2003, pp.223-233.

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Résumé de l'article : Dans une conception moins défavorable à l'ordre économique que celle adoptée par la plupart des auteurs de l'ouvrage, hostile par principe aux mécanismes marchand, il s'agit de montrer que les marchés n'excluent pas toute valeur, n'ont pas dans leur indifférence les ennemis.

Ils n'en sont pas non plus les protecteurs naturels, puisque les valeurs n'y auront plus place que si elles présentent une utilité dans la mécanique des marchés.

Mais si cela est le cas alors l'efficacité de ce qui est d'une façon exagérée désigné comme l'ordre concurrentiel car il convient plutôt de se référer à un ordre économique va soutenir ces "valeurs". Il en est ainsi de la parole donnée, socle des contrats, qui est aussi le socle des "engagements" dont les marchés ont besoin, tandis que les marchés ont également besoin de la fidélité dont la parole donnée n'est qu'une forme, la clientèle en étant une autre, et plus encore de l'impartialité.

Tant d'exigences que le droit lui-même peut satisfaire, notamment parce qu'il se soucie d'autre chose que de la satisfaction économique immédiate, la confluence des deux buts pouvant alors aider le droit dans sa protection de la personne. 

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11 mars 2003

Publications

Référence complète : FRISON-ROCHE, Marie-Anne, Valeurs marchandes et ordre concurrentiel, in Mélanges en l'honneur d'Antoine. Pirovano, L’ordre concurrentiel, éd. Frison-Roche, 2003, pp.223-233.

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