Publications [802]

Mise à jour : 6 septembre 2016 (Rédaction initiale : 15 juin 2016 )

Publications

Référence complète : Frison-Roche, M.-A., Face au fait des maternités de substitution, que peut faire le juge ?, in Dossier "Autour de la gestation pour autrui", Les cahiers de la justice, Revue trimestrielle de l'École nationale de la magistrature, ENM/Dalloz, 2016.

La GPA, ou maternité de substitution, est une pratique qui conduit à s'interroger sur la normativité juridique à travers la relation entre le droit et le fait, que celui-ci soit technologique, sociétal, économique ou géographique.

Face aux litiges qui lui sont soumis, le juge français doit rendre une décision en application des règles de droit en vigueur, y compris européennes.

La question ici posée est de savoir si, au regard de ses pouvoirs et de son office, le juge peut et doit dégager des solutions techniques plus fines et s'il peut et doit répondre par principe.

 

Lire l'article.

Lire le working paper ayant servi de base à l'article.

4 septembre 2016

Publications

En organisant la "résolution bancaire" et en présentant celle-ci comme une "procédure collective spéciale",  le Droit a-t-il le front de poser la question : l'État  est-il mortel ?

Par nature, le droit des successions suppose la mortalité des êtres humains. Par nature, le droit des procédures collectives suppose la mortalité des entreprises!footnote-595 .

La résolution bancaire a été inventée récemment parce que pourraient mourir des opérateurs économiques peu ordinaires et intimes de l’État, les banques qui s'adossent à celui-ci et lui empruntent sa puissance de création monétaire. Mais à l'inverse de la représentation que le Droit se fait des êtres humains et des entreprises, le Droit comme la politique  supposait l'immortalité de l’État. Les marchés en évoquant sans cesse la "faillite des États" sont-ils en train de remettre en cause cela ?

La Résolution bancaire, si elle ne devait être qu'un espace de procédure collective, en ce qu'elle serait rattachée à des États eux-mêmes "en difficulté" ouvre cette question-là. .

Elle n'est pas seulement technique et dérogatoire comme on la présente à l'envi, elle est encore écartelée entre deux droits communs qui prétendent l'inspirer et combler les lacunes de son organisation. Car les textes étant très bavards à son propos, ils sont donc très lacunaires. La résolution bancaire peut prendre racine dans le Droit des procédures collectives, dont elle serait une espèce particulière. Elle peut aussi être une déclinaison du Droit de la régulation, lequel est indifférent à la sauvegarde de l'établissement, son souci étant la solidité du secteur, potentiellement mise en danger.

La prétention de ces deux droits communs à gouverner l'application du droit de la résolution bancaire, les deux rois de cette partie d'échec qui s'est notamment jouée devant la Haute Cour de Londres en 2005, Goldman Sachs étant joueur dans cette partie-là, donnera les solutions techniques prochaines.

Ces solutions techniques pourraient inspirer le droit applicable à d'autres "opérateurs cruciaux" que les banques et venir enrichir le droit de la régulation, technique de la solidité à long terme des secteurs économiques.

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Sur l'importation du vocabulaire de "vie" et de "mort" sur les cycles économiques, notamment la "néo-mortalité" des entreprises dans la conception même du droit des procédures collectives :  ....

30 août 2016

Publications

Ce working paper sert de base à un article paru dans le Recueil Dalloz.

Il est également disponible en version anglaise (en cliquant sur le drapeau britannique).

 

L’on parle de plus en plus de "compliance". On peut lire articles, ouvrages, littérature grises, décisions ou définitions. Mais rien ne converge vraiment. Et bientôt le terme de "conformité" vient en parallèle, voire en substitut!footnote-565. Émergent autant de définitions qu'il y a d'auteurs. Pourtant les applications se multiplient, dans des cas très divers, du droit de la concurrence au droit financier international, allant du droit le plus dur, les sanctions semblant aller de pair, à l'éthique des affaires où seul le sentiment de bien se tenir devrait suffire.  Au moment où la "compliance" envahit le droit, il faut d'abord reconnaître à quel point nous ne mesurons pas ce mécanisme puisque chacun ne le voit qu'à sa porte (I), alors qu'il est nécessaire de construire aujourd'hui un véritable "Droit de la compliance" (II). 

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V. par ex. Dudzinska, K., Manivit, B., Marquer, E., Morelle, F., Le guide pratique de la conformité, coll. Cahiers financiers, Larcier Business, 2017.

Les Editions Lamy ont une collection dont le titre est "Lamy Conformité. On y trouve par exemple :  Collard, C., Delhaye, C., Loosdregt, H.-B., Roquilly, C., Risque juridique et conformité, 2011, ou Lefèbvre-Dutilleul, V., Codes de bonne conduite – Chartes éthiques, 2012,

Mise à jour : 18 juin 2016 (Rédaction initiale : 8 novembre 2015 )

Publications

 Référence complète : M.-A. Frison-Roche, Les conséquences régulatoires d'un monde repensé à partir de la notion de "donnée", Document de travail, novembre 2015.

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🎤Ce working paper a en premier lieu servi de base à une intervention à un colloque organisé par  le internet-espace-/">Journal of Regulation,  ayant pour thème :    internet-espace-/">Internet, espace d'interrégulation.

Regarder les slides ayant servi de support à la conférence.

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🚧 Ce document de travail est articulé  avec un premier document de travail qui a pour objet de réfléchir sur le monde actuel, qui est en train de se reconstruire à partir de la notion de "donnée", ce qui constitue une "révolution". 

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📝 Il a servi de  base à l'article publié dans l'ouvrage 📕internet-espace-dinterregulation-dir/">Internet, espace d'interrégulationédité dans la Série Régulations, aux Éditions Dalloz.

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► Résumé du document de travail : La première conséquence régulatoire tient au fait que ce que l'on désigne souvent comme "l'objet" de la donnée (la personne, l'entreprise pour la donnée financière, l'économie pour le rating, etc.), n'est que sa source, son "sous-jacent", la donnée étant fabriquée par une entreprise ou par l’État  tandis que son objet est bien plutôt l'usage pour lequel cette donnée a été construite et articulée à d'autres.  La donnée est donc autonome de son sous-jacent, est mise en masses affectées, prend une valeur économique en fonction des désirs qu'en ont ses utilisateurs et ses acheteurs, devient disponible hors du temps et de l'espace dans le numérique. Cela implique une interrégulation spécifique.

Mais la donnée est aussi le Janus du numérique, car, nouvel or noir, pur instrument financier, par nature immatérielle, la donnée conserve pourtant la trace des personnes. Elle la conserve, la met en exergue et en danger. Le Droit peut alors établir de force une indissociabilité entre la donnée et son sous-jacent, pour protéger celui-ci, notamment s'il s'agit d'une personne, ou pour atteindre celui qui utilise l'information.  Cette double-face de la donnée entraîne des chocs de régulations dans Internet. Le cas Safe Harbor l'illustre.

En outre, tout Internet ramène vers l'internaute, dans lequel l'on verrait volontiers "Le Grand Interrégulateur". Mais est-ce si adéquat, légitime et efficace ? Le "consentement," auquel renvoie l'interrégulation assurée par l'internaute lui-même, fait naître le doute. En revanche, sous le vocable déplacé de "droit à l'oubli" se dissimule une arme efficace qui peut frapper ceux qui accaparent les données dans une économie numérique qui semble se constituer dans un mécanisme anté-marché, c'est-à-dire dans une régression qui pulvérise l'autorégulation marchande elle-même pour remplacer les actes juridiques d'échange par des actes juridiques conjonctifs, organisation que pour l'instant le Droit et la Régulation ont bien du mal à appréhender, faute des qualifications juridiques pour ce faire.

Le "droit à l'oubli" requalifié à travers la catégorie des actes conjonctifs serait un premier pas pour satisfaire un objectif de la régulation, assurant à la fois la protection de l'innovation et la protection des personnes, dans un futur qui doit rester toujours ouvert et que nulle puissance économique ou politique ne peut s'approprier.

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🔓lire le document de travail ci-dessous⤵️

31 mai 2016

Publications

► Référence complète : M.-A. Frison-Roche, "Au cœur du Droit, du cinéma et de la famille : la vie", préface de M. Florès-Longou et E. Épinoux (dir.), La famille au cinéma. Regards juridiques et esthétiques, Florès-Longou, coll. "Droit & cinéma",  Mare & Martin, 2016, p. 21-27.

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📗Lire une présentation générale de l'ouvrage.

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🚧Lire le working paper à partir duquel l'article a été écrit, contenant des notes et une centaine de liens hypertexte, notamment vers des extraits de films.

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📝Lire l'article.

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► Résumé de cet article : Cet article introductif, qui constitue la préface de l'ouvrage, s'appuie sur une centaine de films pour montrer que le cinéma ne cesse de montrer des situations et des personnages juridiques, même si le "droit de la famille" paraît y être moins l'enfant chéri que les acteurs du procès. On trouve encore l'enfant, la mère et le père, les époux et les fiancés. Souvent sous la forme de drames, de ruptures, de machinations voire de meurtres, car c'est ainsi que la famille apparaît vivante sur l'écran. Il est si difficile de ne pas s'endormir face au bonheur tranquille des familles heureuses.

Mais pourquoi une telle confluence entre le Cinéma et le Droit de la famille ?

Parce que l'un et l'autre ont un objet : la vie.

Ne pas se soucier de la vie de famille, c'est ne pas comprendre le Droit de la famille. Et puisque le Cinéma a pour objet la vie-même, alors lorsqu'on veut apprendre le Droit de la famille, c'est le chemin des cinémas qu'il faut prendre.

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Mise à jour : 14 mai 2016 (Rédaction initiale : 7 novembre 2015 )

Publications

Ce working paper a servi de base à la préface de l'ouvrage de Magalie Flores-Lonjou et Estelle Épinoux (dir.),  La famille au cinéma. Regards juridiques et esthétiques, préf. Marie-Anne Frison-Roche, coll. "Droit et Cinéma", Éditions Mare et Martin, publié en mai  2016.

Depuis la transmission du texte, il y a plus d'un an, ce working paper a été à plusieurs reprises enrichi.

Il comprend des liens hypertexte vers environ 90 films qui m'ont paru pertinents pour le thème.

 

2 mai 2016

Publications

Ce working paper sert de base à un article paru ultérieurement  dans Chroniques Féministes.

La pratique de la maternité de substitution (GPA) consiste à obtenir d'une femme, de gré ou de force qu'elle engendre un enfant à l'unique fin de le céder à la naissance à celui ou à ceux qui ont eu le désir de sa venue au monde.  Ceux-ci s'attribuent la qualité de "parents", puisqu'ils ont eu seuls l'intention d'être le ou les parents de l'enfant engendré par la femme qui accouche. En symétrie, celle-ci ne devrait plus rien être, du seul fait qu'elle n'a pas eu l'intention d'être la "mère" de cet enfant, non seulement "cédé" par avance mais plus encore fabriqué à seul fin d'être cédé à ceux qui l'ont commandé.

Le Droit est central dans cette pratique.

Le Droit a été central dès le départ, parce que différents systèmes juridiques ont posé, avant que cette industrie de la procréation ne se développe,  ont posé que cette convention entre la mère-porteuse et les commanditaires, nouée le plus souvent par l'intermédiaire d'une agence ou/et d'une clinique, est atteinte de nullité absolue car pas plus le corps de la femme l'enfant ne peut être cédé, même sans contrepartie financière : seules les "choses" peuvent être cédées, et les femmes et les enfants sont des personnes.

Le Droit est aujourd'hui central parce que les pays dans lesquels les femmes sont utilisées pour produire des bébés au bénéfice des étrangers qui désirent d'être parent, lesquels versent aux agences et aux cliniques les honoraires nécessaires pour venir prendre le bébé à la naissance et l'emporter chez eux, ont promulgué dernièrement des lois pour stopper cette nouvelle sorte de trafic triangulaire qui prend appui sur des contrats.

Le Droit sera central demain parce que c'est par le discours juridique que les industriels de la récolte des ovocytes et de la location des ventres des femmes afin de fabriquer des bébés, matériels féminins qui permet de s'enrichir à perte de vue, entendent faire ployer l'interdiction que le Législateur a édictée, il y a 20 ans en Europe, nouvellement dans les pays pauvres aujourd'hui touchés. Les tests de résistance se mesurent. Les paris sont ouverts. Les uns parient sur l'argent, les autres espèrent encore dans l'humain.

Les procédés juridiques sont particulièrement atroces ... et efficaces. Plutôt que d'affronter le Législateur et de "parler vrai", c'est-à-dire de reconnaître que les femmes sont trop faibles pour résister au marché dans une globalisation qui ôte aux États toute puissance, le Droit ne pouvant plus protéger personne, les pro-GPA prétendent agir "en douceur" et au nom des "droits de l'enfant innocent". Pour mieux anéantir les droits des femmes, instituées ainsi ennemies de l'enfant....

Il convient tout d'abord de décrire la façon dont ceux qui veulent construire le marché de la GPA, lequel sera alimenté par la production industrielle d'enfants sur-mesure y compris fabriqués gratuitement par des mères-porteuses, ont pour cela "diviser les droits", monter les "droits de l'enfant" contre les "droits de leur mère" (I). Cette sophistique juridique est mortifère. L'avenir est dans la défense conjuguée des droits des enfants et des droits des femmes, qui ne sont en rien en "vases communicants" pour que l'être humain ne devienne pas la matière première à la disposition d'autres êtres humains, mieux placés qu'eux, pour la grande fortune des entreprises intermédiaires (II).

26 avril 2016

Publications

Si aux États-Unis, la pratique de la maternité de substitution (GPA) rencontre assez peu de difficulté, parce que dans une culture de marché tout s'achète dès l'instant qu'il y a "consentement", l'Europe pose que les personnes, parce qu'elles ne sont pas des choses, ne peuvent être ainsi "cédées", quelles qu'en soient les raisons et les conditions, dès la mère (qu'on ne peut destituer en "porteuse")) ni l'enfant.

Cette Europe qui résiste, les entreprises qui veulent construire l'industrie et le commerce de l'humain, la vente de maternité, la fabrication d'enfant à seule fin d'être cédée, veulent la faire fléchir.  Elles l'encerclent.

L'Europe résiste. C'est ainsi qu'après avoir posé il y a trente ans la nullité absolue des conventions de GPA, tout dernièrement encore le Parlement européen en décembre 2015 a posé la lutte contre la GPA comme une priorité car il s'agit d'une mise en esclavage des femmes. Le 15 mars 2016, le Conseil de l'Europe a rejeté un projet de résolution présenté par Petra de Sutter admettant le principe de la GPA dès l'instant qu'elle serait "éthique", le Conseil ayant conscience que c'est le principe de la GPA qu'il s'agissait de faire passer.

Mais un tel rejet, qui devrait juridiquement avoir valeur définitive, ne décourage pas les personnes intéressées à briser la position européenne. Petra de Sutter demande un nouveau vote. Pour cela, elle a modifié quelques éléments de son rapport, présenté ainsi comme "nouveau", demandant à ce qu'il y ait entre les parties à la GPA des "liens d'amitié" pour que "l'altruisme" soit véritable. Le but reste le même : briser le principe de prohibition de la GPA, qui seule protège les femmes et les enfants de n'être pas traités comme des choses, car les femmes et les enfants sont des personnes, qu'on ne peut "céder". Tant que l'esclavage n'est pas rétabli.

Lire l'article

 

 

22 avril 2016

Publications

► Référence complète : Frison-Roche, M.-A., Penser le monde à partir de la notion de "donnée", in Frison-Roche, M.-A. (dir.), Internet, espace d'interrégulation, série "Régulation", 2016, p.7-16.

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► Résumé de l'article : Le Droit est une reconstitution du monde à travers des définitions et des catégories, exprimées par des mots, auxquels on impute des corps de règles. Il y a toujours un part d’invention dans le Droit articulée à un part de fidélité au monde concret qu’il retranscrit, combinaison permettant au Droit de régir celui-ci. Le Droit est mis en difficulté par ce que le terme de « donnée », assez nouveau, n’est pas aisé à définir. Le fait qu’on le formule étrangement en latin pour montrer qu’il y a pluralité, les data, avant de lui associer un adjectif anglais lorsqu’il y a beaucoup, les big data, ne nous avance pas plus sur ce qu’est une "donnée". Or, le Droit est un art pratique qui ne fonctionne bien que s'il manie des catégories dont on maîtrise la définition. C'est pourquoi dans un premier temps il convient de reconnaître les incertitudes de la notions mêmes de "données" (I), pour s'orienter dans un second temps vers ce qu'est une donnée, à savoir une valeur "pure" dans une société de consommation d'information (II).

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📝Lire l'article.

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📝Cet article est corrélé à un autre article publié dans le même ouvrage : Les conséquences régulatoires d'un monde repensé à partir de la notion de "donnée".

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Cet article s'appuie sur un working paper comprenant des liens hypertextes et des notes s'ouvrant par pop-up.

22 avril 2016

Publications

Référence complète : Frison-Roche, M.-A., Les conséquences régulatoires d'un monde repensé à partir de la notion de "donnée", in Frison-Roche, M.-A. (dir.), Internet, espace d'interrégulation, série "Régulation", Journal of Regulation - Dalloz, 2016, p.183-207.

Lire l'article.

Il est à corréler à un article publié dans le même ouvrage : Penser le monde à partir de la notion de "donnée".

 

Cet article s'appuie sur un working paper : lire le working paper.

Mise à jour : 12 mars 2016 (Rédaction initiale : 7 novembre 2015 )

Publications

 Référence complète : M.-A. Frison-Roche, Repenser le monde à partir de la notion de "donnée", Document de travail, novembre 2015.

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🎤Ce working paper a servi de base à une intervention à un colloque organisé par  le Journal of Regulation,  ayant pour thème :    Internet, espace d'interrégulation.

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🚧 Ce document de travail est articulé  avec un second Document de travail qui, tirant les conséquences de celui-ci, élabore les conséquences régulatoires d'un monde repensé à partir de la notion de donnée

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📝 Il a servi de  base à l'article publié dans l'ouvrage 📕Internet, espace d'interrégulationédité dans la Série Régulations, aux Éditions Dalloz.

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► Résumé du document de travail : il a pour objet de réfléchir sur le monde actuel, qui est en train de se reconstruire à partir de la notion de donnée". Le Droit est une reconstitution du monde à travers des définitions et des catégories, exprimées par des mots, auxquels on impute des corps de règles. Il y a toujours un part d’invention dans le Droit articulée à un part de fidélité au monde concret qu’il retranscrit, combinaison permettant au Droit de régir celui-ci.

Le Droit est mis en difficulté par ce que le terme de « donnée », assez nouveau, n’est pas aisé à définir. Le fait qu’on le formule étrangement en latin pour montrer qu’il y a pluralité, les data, avant de lui associer un adjectif anglais lorsqu’il y a beaucoup, les big data, ne nous avance pas plus sur ce qu’est une "donnée". Or, le Droit est un art pratique qui ne fonctionne bien que s'il manie des catégories dont on maîtrise la définition. C'est pourquoi dans un premier temps il convient de reconnaître les incertitudes de la notion mêmes de "données" (I), pour s'orienter dans un second temps vers ce qu'est une donnée, à savoir une valeur "pure" dans une société de consommation d'information (II).

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🔓lire le document de travail ci-dessous⤵️

27 février 2016

Publications

Ce working paper sert de base à un article paru ultérieurement dans les Cahiers de la justice (Dalloz), dans un numéro consacré à la GPA.

La maternité de substitution (GPA) est une pratique. On peut, voire on doit, avoir une opinion à son propos. Pour ma part, j'y suis radicalement et définitivement hostile. Mais ce n'est pas l'objet de cette contribution que de défendre cette position. Puisqu'il s'agit d'un article d'introduction dans une publication plus particulièrement destinée à des magistrats, la perspective ici prise est  celle du Juge, et la question posée est celle de savoir, si face à cette pratique, il peut techniquement faire quelque chose et s'il doit faire quelque chose au regard de son "office". Le thème de la GPA constitue un cas particulièrement net d'une question plus générale, de savoir s'il est même possible pour le Droit de faire encore "quelque chose" face à des phénomènes qui, technologiquement, économiquement, sociologiquement, semblent aujourd'hui "dépasser" le Droit. Le Droit serait-il donc désormais l'inférieur du Fait ? Peut-être. Autant le savoir. En tout cas, il faut y réfléchir. La GPA en est une bonne "épreuve", au sens probatoire du terme.

Les juges sont pris à partie, mais on ne peut reprocher au juge français de rendre des décisions en matière de GPA, puisque des justiciables portent des causes à trancher, que c'est leur office de le faire et qu'ils doivent le faire en application des règles de droit applicables, y compris les règles européennes, telles interprétées par la CEDH (I).

Dans son office, le juge a pour fonction de reprendre les solutions techniques, cela et pas plus, mais il peut aussi exprimer à travers la technique de motivation exprimer ce qui est la fonction même du Droit, à savoir la protection de la dignité des personnes, ici le cœur même de la question, comme l'exprima le 14 septembre 2015 le Tribunal Fédéral Suisse (II).

15 février 2016

Publications

Référence complète : Frison-Roche, M.-A., La référence aux "coûts pertinents du service rendu" : nouvelle rationalité de la tarification de l'acte notarié, in XXVièmes Rencontres Notariat-Université, Le notaire en 2016, La Semaine Juridique - Notariale et Immobilière, n°2, 15 février 2016, p.56-62.

Lire l'article.

Cet article s'appuie sur un working paper.

La tarification des actes notariés était antérieurement analysée comme un acte de souveraineté. La façon dont la loi dite "Macron" y procède a souvent été perçue comme une sorte de "libéralisation effrénée".

Il n'en est rien. La Loi nouvelle conduit vers une technique de Droit de la Régulation, c'est-à-dire l'inverse du Droit de la concurrence.

2 février 2016

Publications

Référence complète : Abécassis, É. et Frison-Roche, M.-A., Les mots pour ne pas le dire, Huffington Post, 2 février 2016

Lire l'article

Orwell décrit dans 1984 le totalitarisme tranquille qui barre tout esprit critique en réduisant la vision possible du monde par la réduction du nombre de mots et leur transformation.

Cette stratégie est à l'oeuvre pour installer en douceur le marché mondiale des mères et des enfants, par l'usage du sigle : GPA.

La grossesse est remplacée par la "gestation", terme qui ne vise que les animaux ; "pour autrui" assigne la femme à une fonction valorisée de sacrifice, "donnant" pour rendre si heureux autrui, en échange de rien.

Le Droit est invité à accompagner car une discussion n'est ouverte sous le dais de l'éthique que sur les modalités de la chose, modalités qui ne pourraient être que "l'esclavage" ou "la solidarité". Tout vont choisir "la solidarité", car qui voudrait l'esclavage ? Ainsi, chacun intériorise la beauté d'un don fait par solidarité de la femme fertile vers l'infertile. Qui oserait être contre.

Mais l'enfant serait séparé de sa mère ? Pour faire céder cette dernière résistance, le travail de la novlangue attaque le lien lui-même et le discours éthique détruit la mère.  L'on présente souvent comme acquis que la femme "porte l'enfant d'une autre". Ainsi, elle ne serait plus mère, elle ne serait plus que "porteuse", elle ne donnerait plus l'enfant, elle le "rendrait". Elle ne serait donc plus rien.

Voilà comment par la manipulation du langage, le marché mondial des esclaves est recouvert par le miel d'un discours dont la mère a été rayée et l'enfant laissé à l'abandon afin d'être cédé dans un trafic organisé par des agences mondiales.

 

14 janvier 2016

Publications

Référence complète : Frison-Roche, M.-A., Sophistique juridique et GPA, D.2016, Point de vue, p.85-87.

Lire l'article.

Lire le working paper à partir duquel l'article a été établi, et qui comprend des notes de bas de page et des liens hypertextes.

Les entreprises veulent établir le marché de l'humain, nouvel or inépuisable, les êtres humains pauvres étant la "matière première" pour les êtres humains plus fortunés. Ainsi, les agences veulent pouvoir vendre à ceux qui ont un "désir d'enfant" et qui ont les moyens financiers de le satisfaire un "enfant sur plan" en offrant de l'argent à une femme qui utilisera sa "capacité reproductive" pour faire venir au monde un bébé et le "cédera" à ceux qui ont voulu sa venue.

Les entreprise qui ont créé ce marché du désir d'enfant ont un obstacle devant elle : le Droit, qui pose que les êtres humains, présent (la femme) et à venir (l'enfant) ne sont pas des choses cessibles. De droit, l'esclavage étant prohibé, on ne peut pas vendre les êtres humains.

Pourtant, les entreprise - il y a tant d'argent à se faire - arrivent palier par palier à faire tomber les obstacles. Elles y parviennent par le Droit lui-même. L'anti-Droit est à l'oeuvre, par une machine de guerre sophistique très puissante dont les destinataires sont à la fois les juges et l'opinion publique, tandis que les victimes, que sont les femmes et les enfants, sont oubliées, recouvertes du voile de la sophistique juridique.

Cette sophistique se déroule en 6 étapes, que nous observons sous nos yeux. L'article les décrit.

Le Droit, qui se définit comme la force qui arrête la force pour protéger le faible qui n'a que le Droit, doit dire Non à cette prouesse sophistique que les entreprises et leurs conseils sont en train de déployer pour installer de fait et de droit la pratique de la maternité de substitution.

2 janvier 2016

Publications

Ce working paper a servi d'appui à la conférence sur Le coût de l'acte , faite dans les Rencontres Notariat - Université le 30 novembre 2015.

Il sert  de base à l'article à la Semaine Juridique : "La référence aux "coûts pertinents pour le service rendu" : la nouvelle rationalité de la tarification de l'acte notarié". Il s'articule avec l'étude de Maître Dominique Houdard : "Présentation de la situation entre le vote de la Loi Macron et la parution du décret à venir devant fixer le nouveau tarif des notaires".

La loi du 6 août 2015 dite "Loi Macron" a constitué comme un choc pour la profession notariale. Cela tient sans doute au fait que certaines dispositions attestent d'un changement de logique. Il en est ainsi du mode d'élaboration du tarif, désormais élaboré en "considération" des "coûts pertinents pour le service rendu" et construit non plus par le seul garde des Sceaux mais encore par le ministre de l’Économie. Il est vrai que le Législateur français a quitté un système de délégation de souveraineté par lequel le tarif était transmis au notaire au même titre que sa charge et sa mission, pour adopter une logique de rationalité économique. Cette nouvelle logique est pourtant tout aussi cohérente. Elle ne surprend la profession notariale que parce qu'elle lui est inusitée. Ordinaire en Droit économique, elle n'emprunte pas au Droit de la concurrence mais bien plutôt à ce qui contrarie celui-ci, à savoir au Droit de la régulation. En cela, la loi nouvelle protège la profession notariale des principes concurrentiels, dans ce qu'ils ont de délétère.

Plus encore, dans cette application du Droit de la régulation et l'utilisation de standard très largement de tarifs élaborés en "considération des coûts", les notaires peuvent trouver une nouvelle place dans une perspective de politique économique, face au Droit de la concurrence ici contré.

30 décembre 2015

Publications

► Référence complète : Frison-Roche, M.-A., Notariat et Régulation font bon ménage, Defrénois, n° 24 du 30 décembre 2015, p. 1334.

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► Résumé de l'article : On a parfois l'impression qu'après s'être ignorés le ministère de l'Économie et le notariat en viendraient aujourd'hui à s'affronter, "Loi Macron" interposée. Cela relèverait d'un malentendu. S'il est vrai que par la nouvelle méthode de tarification la loi du 6 août 2015 change la logique du tarif et par laquelle la conception même de ce qu'est un notaire, cela ne signifie en rien que la loi précipite la profession dans la concurrence pure et simple : elle met en place une Régulation. Très classiquement, les tarifications y sont élaborées par rapport aux coûts, méthode française admise l'Union européenne. En cela, la loi nouvelle protège la profession notariale du Droit communautaire. Plus encore, elle offre à celle-ci un nouveau rôle, plus actif que précédemment.  Pour organiser une régulation, laquelle est l'opposé de la concurrence, l’État doit toujours s'allier avec les professionnels. Ils ne doivent pas manquer ce rendez-vous.

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📝Lire l'article.

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29 décembre 2015

Publications

Ce working paper sert de base à un article paru au Recueil Dalloz le 14 janvier 2016.

Celui qui est sincère pose une question pour avoir une réponse qu’il ne connait pas par avance. Le rhétoricien cherche à influencer son interlocuteur pour accroître la probabilité que la réponse qui lui sera apportée lui soit favorable. Mais le sophiste glisse dans la question la réponse qu’il a pour but d’obtenir, celle-là précisément et surtout pas une autre. La question n’est donc pas une question puisqu'elle n’ouvre aucun débat, c’est une manœuvre d’adhésion obligée et pourtant consentie. La question n'est posée que pour obtenir un consentement unanime de l'auditoire dont le sophiste pourra se prévaloir par la suite pour mieux terrasser tout contradicteur qui voudrait le contrer, car il sera désormais armé des réponses qu'il a lui-même écrites.

Or, sous nos yeux le plus terrible exemple de sophistique juridique est en train de se déployer : celle mise en place depuis quelques années par les entreprises pour établir le marché du matériel humain, afin que le corps des femmes soit cessible, matière première pour fabriquer à volonté des enfants sur commande, cédés à la naissance pour satisfaire un désir d'enfant. L'établissement de ce marché est appelé par certains GPA.

Voilà comment est en train de se dérouler cette sophistique juridique. Elle est construite en 6 temps :

23 décembre 2015

Publications

Référence complète : Frison-Roche, M.-A., Les différentes natures de l'ordre public économique, in Archives de philosophie du droit, L'ordre public, t.58, Dalloz, 2015, p.105-128.

Cet article vient à la suite d'une conférence et s'appuie sur un working paper dans lequel ont été insérées les références et les liens hypertextes.

Lire l'article.

Renvoyant au rapport de force entre le Droit et l'Économie, l'ordre public économique a plusieurs natures. En premier lieu, l'on doit distinguer l'ordre public "gardiens des marchés", de l'ordre public "promoteur des marchés", de l'ordre public "architecte des marchés". En second lieu, l'on doit distinguer l'ordre public de "constitution des marchés" de l'ordre public posant des "octrois aux marchés".  Celui-ci est  premier, puisqu'il empêche que des objets de désir, objets naturels d'échange, deviennent objets de marché. Cet ordre public économique qui brise les élans de désir est hautement politique. Si l'on ne l'admet pas, alors le Droit n'est plus que l'agent d'effectivité du système économique, lequel engendre une société d'ajustement des désirs individuels.

 

 

 

6 décembre 2015

Publications

Le 13 novembre 2015, des êtres humains ont déployé comme activité de massacrer tout ce qui a pu tomber sous le feu de leurs fusils mitrailleurs. Une telle boucherie était inconcevable, elle fût pourtant si aisément exécutée. Ainsi, ce que l'on ne fait pas, non pas parce que cela serait difficile mais parce qu'on ne s'autorise pas à le faire, c'est-à-dire tuer à l'aveugle le maximum d'êtres humains sans distinguer  entre eux, a été fait. Simplement parce que les auteurs ont considéré leur acte comme concevable, parce qu'ils n'ont pas considéré les victimes comme des personnes et ont pu sans difficulté en tuant le plus possible le plus vite possible le mieux possible.

Cela conduit à regarder les activités humaines à travers quatre qualifications et à les confronter au Droit.

Prenons quatre qualifications qui sont comme 4 cubes : Faisable, Infaisable, Concevable, Inconcevable.

Et ensuite construisons ce qui va arriver demain et ce que le Droit doit en dire aujourd'hui. 

Dans la réalité concrète, il y a des activités "faisables", parce que des individus ou des organisations en ont le désir et les moyens, physiques, techniques et financiers. Par symétrie, il suffit que manquent un de ses éléments manque pour que l'activité deviennent "infaisable" faut d'individus, d'organisation, d'espace, de technique, d'argent pour la mener ou de désir de le faire.

Par ailleurs, et c'est bien en parallèle qu'il convient de le penser, l'activité est "concevable". Comme nous sommes dans un système de liberté d'action, toute activité est concevable pragmatiquement dès l'instant qu'elle n'est pas "inconcevable". C'est le Droit qui peut poser que certaines activités sont inconcevables et les prohiber de ce fait. Les actes qui portent atteintes aux droits fondamentaux de la Personne, notamment. Le Droit imprime donc dans le monde concret la ligne entre le concevable et l'inconcevable, en posant par principe que l'inconcevable ne doit pas être fait.

Le principe selon lequel l'inconcevable ne doit pas être fait est le marque d'une société civilisée.

Sommes-nous aussi sûrs d'une articulation aussi simple et fondamentale aujourd'hui ?

Il convient de reprendre ces couples sur lesquels se construisent les sociétés. On peut tout d'abord les prendre un à un : le faisable et le Droit / l'infaisable et le Droit /l'Inconcevable et le Droit / le concevable et Droit.

Cela permet ensuite de les confronter en couple au Droit. Le faisable et le concevable face au Droit / L'infaisable et le concevable face au Droit / L'infaisable et l'Inconcevable face au Droit / le faisable face au Droit.

Dans un système technicien dans lequel le Droit est une "technique neutre", celui-ci accompagne ce qui "se fait" ou "se fera". Dans un système civilisé, les personnes vivant en groupe et prenant en considération autrui au regard d'une règle commune, les personnes doivent se comporter comme cela est concevable. Ainsi, comme une activité est à leur portée, si elle ne se conçoit pas c'est au Droit de l'entraver. Par exemple il est aisé de tuer toute une masse de personnes. Cela est faisable mais cela ne doit pas avoir lieu car cela n'est pas concevable si l'on accorde importance à la notion inventée par le Droit : la Personne.

A la croisée entre le Faisable et l'Inconcevable se situe donc le Droit lui-même. Il y apparaît en tant qu'il est distant des faits et constitue un mur sur lequel vient buter l'inconcevable qui se fait, hypothèse de gouffre de la civilisation. 

2 novembre 2015

Publications

Référence complète : Frison-Roche, M.-A., Droit et Marché : évolution, in Dormont, S. et Perroud, Th. (dir.) Droit et Marché, coll. "Droit et Économie, LGDJ - lextenso éditions, 2015, p.265-278.

Cet article trouve une forme plus développée et plus personnelle dans un working paper et constitue le prolongement d'une participation à un colloque.

Accéder à l'article.

Droit et Marché à première ne sont pas sur le même plan, l'un étant une construction, une invention humaine, l'autre étant des marchés. Mais depuis le XVIIIième en Europe, l'on a pareillement institué, donc inventé le "Marché". Ces deux institutions ont un rapport dialectique, puisque c'est par le droit que le Marché a été construit. La puissance des institutions dépend de ceux qui les construisent mais surtout de la foi de ceux qui les contemplent. Or, si le Droit a construit le Marché, aujourd'hui la foi se tourne vers le Marché et la croyance d'une loi qui lui sera proche et naturelle le rend universel, transportant avec lui sa "petite loi" juridique qu'est le contrat et le juge qui y est inclus, l'arbitre. Plus encore, parce tout cela n'est qu'affaires humaines et donc affaires de pouvoir, la place de l'Institution qui fût celle de la puissance, tirée de sa source, par exemple le Peuple Constituant, est en train de descendre en-dessous de ce qui est là, c'est-à-dire le fait. En effet, que peut-on contre un fait ? Seul Dieu, et donc une Assemblée parlementaire par exemple qu'il est aisé de destituer, peut prétendre lutter contre un fait. Or, le Marché est aujourd'hui présenté comme un fait, tandis que ce qui le gouverne seraient des phénomènes naturels, comme l'attraction entre l'offre et la demande, le fait d'offre ce qui attire, le fait de demander ce que l'on désire. Dès lors, seul Dieu, souvent brandi avec grande violence, peut prétendre encore dire quelque chose contre cela.

Aujourd'hui, Droit et Marché sont face à face. Curieusement les juristes sont assez taisant, peut-être sidérés de la destitution du Droit. Mais c'est la question de la Loi première qui est en jeu. Dans l'esprit occidental, depuis la pensée grecque l'on a pensé le sujet et la personne comme étant première, c'est-à-dire posée sans condition. Si on pose comme loi première l'efficacité de la rencontre des offres et des demandes, le monde a changé. Un monde sans Personne, avec des êtres humains plus ou moins attrayant, plus ou moins demanding , le monde des puissances ayant remplacé le monde de la volonté égale de tous. La technique devient la préoccupation première. Le droit qui était "art pratique" et les lois faites pour l'homme, devient une technique et les juristes se devront alors d'être neutres. Depuis quelques décennies, Droit et Marché sont donc face-à-face, mais le Marché semble en passe de dominer parce qu'il est en train de quitter le statut inférieur d'institution pour accéder à celui, universel, de fait. Il est en cela en passe de gagner.

 

Mise à jour : 25 octobre 2015 (Rédaction initiale : 30 août 2015 )

Publications

Ce Working Paper sert de base à une contribution parue en décembre 2015 aux Archives de Philosophie du Droit.

La notion d'ordre public économique renvoie au rapport de force entre le Droit et l’Économie. L'ordre public économique a lui-même plusieurs natures suivant les rapports que le droit peut entretenir avec l'économie. Il est  important de les distinguer nettement et de ne pas les confondre. En premier lieu, l'on doit distinguer "l'ordre public gardien des marchés", de "l'ordre public promoteur des marchés", de "l'ordre public architecte des marchés". En passant de l'un à l'autre, la dimension politique, voire souveraine, de l'ordre public économique apparaît du fait du changement de nature. En second lieu, l'on doit distinguer "l'ordre public de constitution des marchés de "l'ordre public d'octroi des marchés". En effet, c'est par des règles d'ordre public que le Droit à l'intérieur des marchés les garde, les bâtit ou les conçoive. Mais ce n'est qu'un versant de l'ordre public économique. Par un ordre public économique premier, des règles construisent des "octrois des marchés", pour empêcher que les objets de désir, objets naturels d'échanges, deviennent de ce fait objets de marché. Il s'agit d'un ordre public économique hautement politique, qui s'exprime par un rejet des élans de désir.

Cela serait une grave faute de ne pas percevoir les trois natures de l'ordre public économique (ordre public gardien de l'économie, ordre public promoteur de l'économie, ordre public d'octroi des marchés) les deux natures de l'ordre public économique.

Comme pour toute chose, la plus grande puissance de l'ordre public est dans sa version négative, ce par quoi des règles ferment l'accès du marché à des objets, des choses ou des prestations qui pourtant sont désirés, qui pourtant sont offertes. Ainsi, les personnes ne sont pas sur le marché, non pas parce qu'il n'y aurait pas de désir qu'elles y soient ni de consentement de leur part, mais parce que des règles d'ordre public économique le disent. Si on ne l'admet pas, alors parce que cette nature-là est la première forme de la prétention que constitue l'ordre public économique, alors celui-ci est dans sa nature-même  récusé.

 

8 octobre 2015

Publications

Référence complète : Frison-Roche, M.-A., Comprendre la Cour de cassation (à propos des deux arrêts d'Assemblée plénière du 3 juillet 2015 sur la pratique des maternités de substitution (dite GPA)), numéro dédié des Petites Affiches, 8 octobre 2015, 24 pages.

Lire le dossier composé de 4 perspectives :

Le 3 juillet 2015, la Cour de cassation a admis par deux arrêts de son Assemblée plénière qu'à condition qu’il y ait un « lien biologique entre l’homme et l’enfant » s'opère la  transcription sur l’état civil français de la filiation mentionnée sur l’état civil étranger, dans l’indifférence du fait que l’homme qui a déclaré l’enfant ait conclu à son propos une convention de maternité de substitution (dite GPA).

Quoi qu'on pense de la pratique des maternités de substitution, ces arrêts sont difficiles à comprendre. Alors que le sujet est très important, voire dramatique. Alors que la Cour de cassation donne des signes de vouloir devenir une "Cour suprême", ce qui suppose à tout le moins des décisions compréhensibles.

Comment essayer de comprendre ce que ces arrêts de quelques lignes veulent dire ? En s'attachant à leur lettre ; en lisant entre les lignes les jeux de pouvoir qui s'opèrent entre les sources du droit (le juge et le législateur) ; en se souvenant à l'audience sensationnelle du 19 juin 2015.

Après cela, on peut se demander si la pratique des maternités de substitution qui consiste pour des personnes qui ont un projet de parentalité à trouver une femme qui consent par avance à fabriquer un enfant pour le céder à l'instant de sa naissance pour qu'il soit l'enfant de ceux qui en ont le projet, est bien ou est mal.

Mais d'abord, il faut comprendre la Cour de cassation.

26 juin 2015

Publications

Référence complète : Frison-Roche, M.-A., Réguler les "entreprises cruciales", Revista de Direito Mercantil indistrial, econômico e finaceiro, 164/165, Malheiros Editores, 2013, p.19-31.

Se reporter à l'article.

La publication dans cette revue brésilienne de droit des affaires est une réédition de l'article paru en France.

A première vue, on ne régule que les espaces et l’État n’a pas à pénétrer les entreprises.

Mais l’impératif s’inverse lorsqu’une entreprise absorbe l’espace tout entier, ou lorsqu’elle en a le projet, comme dans le cas

Google. L’entreprise cruciale est négativement celle dont la défaillance entraîne l’effondrement du système; l’entreprise est positivement cruciale si à travers elle le secteur est orienté vers des finalités au service de l’avenir du groupe social.

L’État est alors légitime à pénétrer l’entreprise, pour y faire entendre sa voix, parfois pour y exercer un pouvoir de décision car le dynamisme concurrentiel et le pouvoir de la propriété n’excluent pas la superposition du souci de l’avenir commun, que certains appellent l’intérêt général.

16 juin 2015

Publications

Que les enfants soient vendus ou "donnés" dans ce que certains présentent comme un "geste magnifique d'altruisme admirable" et au terme ce que les mêmes affirment être un "plein consentement" ne change rien  : la convention de maternité de substitution est une atteinte à la dignité de la personne humaine.

Que la Cour européenne des droits de l'Homme ait pu la justifier par la considération d'un lien biologique entre ceux qui obtiennent la livraison de l'enfant commandé est inadmissible. Si la Cour de cassation l'admettait, non seulement les mères et les enfants seraient à vendre avec la bénédiction des juges, mais encore le marché des liens de filiations serait en place.

Article.