by Marie-Anne Frison-Roche
L'ouvrage de Stéphane Voisard est très intéressant car il montre que des personnes privées sont intégrées par la puissance publique pour que le système de supervision des banques soit efficace. Il faut mais il suffit que ces personnes soient des experts fiables et crédibles.
Il montre tout à la fois que c'est une conception assez générale du droit administratif.
Son ouvrage démontre que cet état du droit et de sa pratique dépasse la distinction du droit public et du droit privé.
Référence complète : VOISARD, Stéphane, L’auxiliaire dans la surveillance administrative. Du droit bancaire financier au droit administratif général, coll. "Travaux de la Faculté de droit de l'Université de Fribourg", éd. Schulth, 2014, 788 p.
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Il s'agit d'une thèse prenant comme exemple le droit suisse, en comparaison avec le droit français et le droit allemand, mais développant une conception plus générale du rôle et du statut que doit avoir ce que l'auteur appelle "l'auxiliaire de surveillance", tel qu'on peut l'observer dans la supervision bancaire et financière, mais dont on peut conceptualiser la catégorie pour l'appliquer d'une façon plus générale.
En effet, à partir de ce qui s'est déjà mis en place dans les secteurs bancaires et financier, l'auteur estime que les auxiliaires, que sont par exemple les commissaires aux comptes ou les experts de justice doivent être regroupés dans une nouvelle catégorie : les "auxiliaires de surveillance". Ceux-ci, diligentes par les uns ou les autres, interviennent dans un mécanisme de surveillance.
Ainsi, cet "expert de surveillance" peut très bien être un agent privé, il participe pourtant à un processus de surveillance qui relève du droit public.
Le droit fédéral suisse vise ce type d'experts expressément dans des procédures administratives, de la même façon que l'Autorité des Marchés Financiers en France vise l'enquête, l'administrateur provisoire ou le liquidateur, tandis que le droit allemand vise des experts.
Ces différents "agents privés" relèvent chacun d'un régime propre, alors que l'auteur propose de les regrouper dans cette catégorie unique de "l'auxiliaire de surveillance". Cela justifierait un régime juridique unifié pour ces personnes, notamment en matière d'obligations et de responsabilité, dépassant la difficulté engendrée par le fait qu'ils sont entre le droit public et le droit privé.
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Ce travail de thèse est de grande qualité.
Il est très utile pour plusieurs raisons :
- La figure de l'expert ne cesse de monter en puissance et l'on ne sait pas très bien où placer ce personnage, alors que désormais la matière bancaire et financière est comme absorbée par le prisme expertal ;
- On ne rendra pas compte du droit bancaire et financier si l'on reste soit dans le droit privé, soit dans le droit public ; les secteurs bancaires et financiers, sans doute en train de fusionner, en tout cas en forte interrégulation, sont régulés et la régulation ne peut être enfermée ni dans le droit public seul ni dans le droit privé seul, mais ne peut se passer de l'un ou de l'autre. Dès lors, penser une catégorie comme "l'auxiliaire de surveillance", agent privé acte de la supervision publique ne peut que bien rendre compte de la réalité, et dès lors être opératoire ;
- Malgré la technicité du droit bancaire et financier, et les cultures juridiques des places, ici suisses, française et allemandes, les fondamentaux des branches du droit sont toujours à l'oeuvre. L'auteur choisit ici de ramener les règles observées au droit administratif général. Il a raison en ce qu'il est très important d'"ancrer" cette matière technique et spécifique, imprégnée par les théories économiques et financières dans le droit le plus classique. L'auteur a choisi le droit administratif, mais l'on peut penser aussi au droit commun des contrats, au droit des biens, au droit processuel et au droit pénal. Faute d'un tel ancrage, le droit bancaire et financier devient imprévisible et arbitraire.
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