Updated: Nov. 16, 2010 (Initial publication: Aug. 9, 2010)

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Le droit des brevets, affaire d'économistes

by Marie-Anne Frison-Roche

Le Conseil d'Analyse Economique auprès du Premier Ministre a conçu un rapport sur les brevets concernant les Universités, fournissant à Valérie Pécresse des pistes pour inciter les universitaires à en déposer davantage, car les chercheurs français publient moins que les autres et déposent moins de brevets que les autres. Il faut profiter du Grand Emploi qui permet d'abonder le Fonds national de valorisation de la rechercher pour 1 milliard, tandis que 800 millions le seront aux Sociétés d'accélération du transfert de technologie (Satt), constituant le guichet unique du dépôt des brevets. Pour accroitre l'efficacité, on encouragera les grappes de brevets.. Il faut développer un esprit managérial chez les universitaires. Enfin, il faut construire des marchés de brevets, sur le modèle des bourses d'échange.

- J'aime beaucoup l'économie et les économistes, le droit et les juristes, mais comme cela porte de mauvais fruits lorsque les deux ne travaillent pas ensemble... Lorsque Stephen Breyer parle de ces questions, il ne cesse de parler de collaboration entre les deux disciplines, c'est-à-dire entre les deux univers de personnalités, et non pas d'autoroutes parallèles. Or, voilà un rapport qui, n'impliquant pas les juristes (et certes combien de juristes de propriété intellectuelle ne songent pas plus à intégrer d'économistes), porte sur une pure invention juridique, car le brevet n'est que du réel juridique, un regard avec des lunettes mal ajustées.

- Ainsi, on vise tout d'abord la cause : les universitaires sont insuffisamment managers. Mais cela dépend entièrement de leurs formations. Dans un système universitaire français construit sur l'agrégation, tout est dans la prestance, l'élégance, la finesse et l'érudition. On est loin de l'esprit schumpeterien. Il faut alors intégrer les modes de recrutement. Mais il aurait fallu solliciter un sociologue....

- Mettre la publication au plus haut des activités, ce n'est pas si mal. C'est montrer l'amour de la science, puisque c'est gratuit et que cela accroît le savoir. Inverser le modèle pour l'insérer dans une dynamique de marché, pourquoi pas, mais Laurent Thévenot (économiste) associé à Luc Boltensky (sociologue) ont montré dans leur ouvrage marquant (La justification) que l'on changeait ainsi "l'économie de la grandeur". Cela n'est pas sans dégât.

- Faire un guichet unique et le défendre au niveau européen. Certes. Cela fait des décennies que les juristes spécialités, par exemple Michel Vivant qui fait référence, le demande.

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