May 19, 1978

Thesaurus : 02. Cour de cassation

Cour de cassation, Assemblée plénière

Arrêt du 19 mai 1978, Dame Roy c/ Institution Sainte Marthe

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Madame Roy est enseignante dans un établissement catholique d’enseignement (Etablissement confessionnel) sous contrat avec l’Etat. Elle est divorcée. Cela ne pose de difficulté au regard de la règle catholique de l’indissolubilité du mariage, puisque au regard de ce dogme, la personne demeure mariée jusqu’au décès de l’un des époux. La violation de la règle religieuse intervient si la personne se remarie car la règle religieuse la qualifie alors comme étant en état d’adultère, ce que la religion catholique interdit. Or, dans le cas soumis aux juges, l’enseignante s’est remariée.

Des parents ont protesté auprès de la direction de l’établissement. Celui-ci a licencié l’enseignante, qui a saisi le Conseil des Prud’hommes, estimant le licenciement sans cause réelle et sérieuse, puisque dans un système juridique fondé sur le principe de laïcité, la violation d’une règle religieuse ne peut pas constituer une faute dans le système normatif du droit.


Pour résoudre cette difficulté, à propos de laquelle les juridictions elles-mêmes avaient retenu des solutions divergentes, la Cour de cassation se réunit en assemblée plénière.

Dans cet arrêt de principe, elle estima que certes le droit est un système laïc, indépendant normativement des systèmes religieux. Ainsi, le manquement à une règle religieuse ne peut constituer en soi une faute juridique. De la même façon, le droit garantit comme liberté fondamentale la liberté du mariage, notamment la liberté pour une personne divorcée de se remarier. Mais, la situation de fait ainsi constituée peut être incompatible avec l’établissement scolaire, en raison de la nature confessionnelle de celui-ci.

Or, la situation de l’enseignante avait entrainé des troubles et sans qu’il soit besoin d’examiner si son comportement était ou non en conformité avec une règle religieuse, sa situation, par ailleurs juridiquement préservée (il ne s’agissait en rien de l’obliger à divorcer de son second conjoint), les juges pouvaient admettre qu’il y avait incompatibilité entre sa nouvelle situation et l’organisation de l’entreprise où elle travaille

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Dans cet arrêt de principe, l’on retrouve un type de raisonnement analogue à celui que prendra plus tard le Conseil d’Etat dans son avis du 27 novembre 1989 concernant le port du voile à l'école : dès l’instant que le comportement ou la situation est incompatible avec le bon fonctionnement d’un établissement, peu importe que ce trouble ait pour cause la violation d’une règle religieuse (l’hypothèse du présenta arrêt) ou au contraire ait pour cause la revendication d’une conformité à une règle religieuse (hypothèse du port du voile), le droit valide la réaction de l’établissement qui fait prévaloir son droit à faire cesser le trouble.

 

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Lire l'arrêt.


 

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